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1917_02_11 Les enfants


Ani
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Les enfants

 

Je vous le dis en vérité, si vous ne vous convertissez

et si vous ne devenez pas comme les petits enfants,

vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux.

Matthieu.[1] 18 :3

 

            Pour expliquer qui peut entrer dans le Royaume des cieux, le Christ se sert d’une forme simple et accessible à tous et qui existe depuis la création du monde : les enfants. Ce qui égaie les foyers, ce qui égaie le monde, ce sont les enfants. Une maison sans enfants, c’est un désert aride sans verdure. Pourquoi l’homme doit-il devenir un petit enfant pour atteindre le Ciel ? Enfant revêt dans le langage du Christ un sens plus profond que celui que nous y mettons. Le Christ ne dit pas : « Tu entreras dans le Royaume de Dieu si tu es une pierre précieuse sur la couronne d’un roi, si tu es millionnaire », mais il dit : « Si tu n’es pas comme un enfant, tu n’entreras pas dans le Royaume des cieux. » Il introduit ici l’idée de rapetissement.

            L’enfant est le symbole d’un état passif qui représente en quelque sorte de l’énergie potentielle, de l’énergie mise en veille. Mais cette énergie n’est pas inactive, car toutes les conditions pour son développement y sont stockées ; elle est à la fois potentielle et cinétique. L’énergie potentielle se transforme en énergie cinétique et vice versa. L’énergie cinétique a un plus grand champ d’activité, mais son ampleur est moindre, alors que l’énergie potentielle peut se développer à l’infini. Il en est de même pour l’enfant par rapport à l’adulte : l’adulte a une moindre ampleur de développement que l’enfant.

            Cette idée de l’enfant a aussi un autre sens : si l’arbre ne retourne pas à l’état de graine et s’il n’est pas planté dans le sol, il ne peut pas recommencer son développement. Le développement des arbres se fait de deux façons : les uns se développent, germent, à partir de graines ; les autres, par bouturage ou marcottage. Il y a une grande différence entre la plante qui a poussé à partir d’une bouture et celle qui a poussé à partir d’une graine. Lorsque la plante vient d’une graine, elle renferme une plus grande vitalité que celle qui se développe par bouturage. Le Christ dit : « Si vous ne vous convertissez pas en graines dans la vie, vous n’entrerez pas dans le Royaume de Dieu », car là, on ressème par graines et non par bouturage. Le Seigneur n’a pas besoin de vieillards, il n’y a pas de vieillards dans le Royaume de Dieu. Le mot vieux est synonyme d’impuissant, alors que les jeunes, les enfants sont synonymes du mot riche en esprit et en cœur. Je l’interprète aussi comme ça : si vous n’avez pas l’esprit et le cœur, c’est-à-dire l’innocence et la pureté de l’enfant en vous, vous ne pouvez pas entrer dans le Royaume de Dieu, car les conditions de développement exigent que votre esprit et votre cœur contiennent la vie divine.

            L’une des plus grandes erreurs dans les mouvements religieux modernes est de considérer que nous sommes grands. Chez chacun de vous, même chez les enfants de cinq ans, il y a cette idée de grandeur. J’ai souvent rencontré des enfants de cinq-six ans chez qui a germé l’idée qu’ils sont grands, qu’ils sont une force importante et qu’ils sont capables de beaucoup de choses. J’ai aussi rencontré des enfants religieux qui se considèrent très importants : « Ne me touchez pas, disent-ils, si je bouge le petit doigt, je suis capable de tout. » Ces enfants, priés de soulever un gros sac, n’en sont pas capables ! Pourquoi ? Simplement parce qu’ils pensent être grands alors qu’il n’en est rien ; s’ils se considéraient petits, ils pourraient alors le soulever. On peut le vérifier : restez tel un enfant en vous-mêmes, déposez une pensée dans votre esprit, et si vous ne vous angoissez pas, elle aura une force dix fois plus productive que si vous êtes constamment en proie à l’inquiétude.

Lorsque vous vous placez devant un interrupteur électrique, qu’attend-on de vous ? Simplement que vous actionniez l’interrupteur. Et la force employée à ceci est minime. Le monde est ainsi arrangé par Dieu : on vous envoie simplement pour actionner cet interrupteur. Mais que fait la majorité des humains ? Ils s’arrêtent devant l’interrupteur pour philosopher ! Aucune lumière ne jaillira de la sorte. Ne philosophez pas à ce moment-là, un seul mouvement du bras et la lumière – la condition pour pouvoir lire – jaillira. La même loi s’applique le matin au réveil : vous actionnez votre interrupteur et vous dites : « Je vois. » Et, lorsqu’elle rentre dans le corps humain, l’âme a un interrupteur qu’elle actionne, disant : « Je vois le soleil. » Si vous oubliez d’actionner votre interrupteur, vous serez dans l’obscurité, c’est-à-dire que votre esprit sera troublé, incapable de travailler. Certains matins vous vous levez et oubliez de tourner l’interrupteur de votre cœur, de votre esprit, et toute la journée votre vie est en désordre, vous ne trouvez aucun sens en elle... Je dis : vous êtes dans la situation d’un enfant avec de grandes prétentions qui songe à de grandes choses en oubliant de faire la chose la plus simple : tourner le petit interrupteur qui permet à la lumière d’entrer dans le monde.

            Je croise constamment des gens avec des interrupteurs non actionnés, avec de grandes idées, qui rêvent de beaucoup de maisons, de maisons à plusieurs étages, alors qu’ils sont aveugles. Vous n’avez pas besoin de ces maisons, tournez d’abord l’interrupteur et construisez ensuite ces maisons. Devenez un enfant de l’obéissance, ce n’est qu’alors que Dieu parlera et que vous comprendrez les rapports qui existent entre Dieu et vous. Nos contemporains ont perdu leur rapport à Dieu, ils se croient libres, en droit de faire ceci ou cela, en droit de critiquer même Dieu. Je demande à une telle personne : « En te levant ce matin, as-tu actionné l’interrupteur ? – Non. – Rentre chez toi et tourne l’interrupteur, car sinon tu seras toute la journée dans l’obscurité et dans l’indisposition, et la vie n’aura pas de sens pour toi. » La même loi s’applique dans les rapports entre les humains : si tu as tourné l’interrupteur, tout le monde t’aime ; tu as oublié de tourner l’interrupteur, tout va de travers. Tu te prends pour quelqu’un d’important, pour une sommité, personne ne t’aimera, personne n’aime les prétentieux. La loi du Ciel donne les enfants en exemple, à cause de leur désintéressement. Porter beaucoup sur ses épaules et avoir peu dans le ventre sont deux choses différentes. Si tu portes cent kilos de blé sur tes épaules et un demi kilo de blé dans le ventre, où sera la force ? Les économistes modernes, en chargeant l’État de dettes, ne comprennent pas la loi divine. Je préfèrerais qu’on distribue à chacun un demi-kilo de blé dans le ventre, plutôt que cent kilos de blé sur les épaules. Il est préférable d’avoir cent grammes de savoir dans le cerveau plutôt que cent kilos de fardeau sur les épaules. Quelqu’un peut avoir cent livres, mais cinquante grammes de savoir dans le cerveau valent plus, en tant qu’énergie potentielle et cinétique, que ce qui est en dehors de lui.

            Ainsi, par le mot enfant le Christ désigne un état intérieur particulier : être en accord, en connexion avec le monde spirituel, avec toutes les forces, avec toutes les créatures. Si tu te mets à penser que tu es quelqu’un d’important, tu perds cette connexion. Lorsqu’un grand ange du Ciel qui a vécu des millions et des milliards d’années, qui a en lui plus d’expérience que toute l’humanité et dont l’histoire est plus longue que celle de tout le genre humain, décide de descendre s’incarner sur terre, il prendra la forme d’un petit enfant et sera humble, il débutera par là son développement pour comprendre la grandeur de Dieu. C’est pourquoi on a interrogé le Christ : « Est-ce qu’un vieillard peut entrer dans le Royaume de Dieu ? »[2] Qu’il soit ange ou Dieu, il ne le peut pas. Celui qui veut y entrer doit être humble, devenir comme un enfant. Vous tous qui m’écoutez ici, vous voulez entrer dans le Royaume de Dieu comme vous êtes. Je dis : non, cela n’a jamais été ainsi et ne le sera jamais. Si vous n’acquérez pas les caractéristiques de l’enfant, la souplesse de l’esprit et du cœur, vous ne comprendrez pas le sens de la vie.

            Vous êtes cependant très proches du Royaume de Dieu : la distance qui sépare ce monde de l’autre est d’un cent millionième de millimètre, c’est tout ce qui sépare les deux mondes. Lorsque l’homme s’engage sur le chemin du développement, il avance très lentement. Je vois tout le monde s’engager sur le chemin spirituel comme des adultes et non pas comme des enfants. Lorsqu’on part à grandes enjambées, on n’atteindra pas son objectif. Si vous voyez quelqu’un sortir en courant, il ne réussira rien ; mais s’il s’engage doucement en accélérant progressivement, il est comme un enfant. Le Christ dit : « Ne commencez pas votre travail en vous pressant, avancez comme les petits enfants, marchez sans relâche et accélérez au fur et à mesure deux, trois, quatre, cinq, six fois, et vous trouverez un sens à votre vie. » Tant que vous êtes comme des petits enfants, aucune maladie ne vous frappera, mais si vous êtes comme des vieillards, toutes les maladies vous assailliront. Celui qui est troublé est vieux ; celui qui porte un fardeau sur le cœur est vieux. Devenez jeune. Tu dis : « J’en ai gros sur le cœur. – Tu es vieux. – Que dois-je faire ? – Deviens jeune ! – Comment ? – Ne songe pas à de grandes choses dans la vie, mets un demi kilo de pain dans ton ventre, cent grammes de savoir dans ton cerveau et cinq grammes dans le cœur, ça te suffit.

            Les jeunes filles, si elles sont courtisées par dix ou quinze jeunes hommes commencent à se tourmenter, à s’agiter, et finissent dans la tristesse. Il y a quelques années une jeune femme a été tuée à Sofia par son fiancé car elle le trompait. Pourquoi aimez-vous deux personnes ? Une seule vous suffit. Chaque pensée a sa place ; si vous n’aimez pas quelqu’un, ne le trompez pas, dites-lui la vérité et il se trouvera quelqu’un d’autre. Et du point de vue religieux, les humains souffrent de ce même amour. On dit : « Soyons aimants », mais savez-vous comment s’exprime l’amour ? Celui qui désire beaucoup commet un péché, et celui qui commet un péché souffre. Celui qui pêche est mauvais, mais celui qui pêche et ne se repent pas est pire ; celui qui pêche et ne se repent pas, ni ne prie est encore pire ; et celui qui ne se repent pas, mais prie est hypocrite, et l’hypocrite est l’homme le pire du monde. Il existe dans le monde deux mensonges, deux types de péchés : lorsque vous affirmez que vous aimez quelqu’un, mais que vous lui mentez, vous agissez comme les crocodiles qui arrosent de leurs larmes celui qu’ils aiment pour le rendre plus lisse et mieux l’avaler. Ce n’est pas cet amour qu’il faut, mais celui des petits enfants. Offre peu, mais du fond du cœur. Si les hommes et les femmes avaient appliqué cette philosophie dans la vie, les foyers et les sociétés se seraient améliorés.

            Père, mère, enfants, enseignants, prêtres, juristes, tous nourrissent de grandes idées, ce sont de grands hommes dans ce monde, plus grands que quiconque. Et vous me demandez pourquoi le monde souffre. Il souffre à cause des « grands » hommes, des « grandes » idées. On dit : « C’est un prêtre remarquable, il prône de grandes idées. » Oui, nous souffrons tous de ces « grandes idées ». Les juifs aussi avaient de grandes idées pour devenir riches, ils se sont enorgueillis d’être le peuple élu et d’avoir trente-trois mille promesses de Dieu, mais le Christ leur a montré que la grandeur de l’homme réside dans sa capacité à être humble comme un enfant, c’est à cette condition seulement que Dieu sera de son côté. Je n’ai pas vu jusqu’à maintenant une mère porter dans ses entrailles un vieillard, même contre des millions, alors qu’un petit enfant est porté sans rétribution. Pourquoi ? Parce que cet enfant porte en lui de grands bienfaits. Chaque idée divine, aussi minuscule soit-elle en entrant, apporte paix, joie et grandeur ; c’est pourquoi chacun peut porter les petits enfants.

            Certains parmi vous pensent que les grandes idées répandent le bonheur dans le monde. Pour illustrer cette pensée je vous raconterai une fable. Un prince allemand sans le sou a voulu se marier avec une belle femme, mais elle lui a dit : « Je suis une femme avec beaucoup de prétentions, tu devras me construire un magnifique palais et tu devras me procurer tout ce que je désire. Si tu es d’accord avec cela, je te prends comme époux. Es-tu prêt ? – Je suis prêt à tout car avec toi je serai heureux, a dit le prince ». Il s’est marié et, par l’occultisme, il s’est mis à chercher des richesses auprès des esprits. Il a trouvé le prince des gnomes et l’a interrogé : « Je me suis marié avec une femme très exigeante et j’ai besoin de beaucoup d’argent, peux-tu me rendre ce service ? – Oui, je le peux, mais à une condition : pour chaque sac plein d’argent tu dois me donner dix cheveux de ta tête. – J’en ai assez, je peux t’en donner plus. – Non, j’en ai besoin de dix uniquement. À chaque fois qu’on se croisera, tu prendras une bourse pleine d’or ». « Je suis à l’abri, s’est-il dit, enfin le jour du bonheur est venu dans mon foyer. » Il s’est mis, semaine après semaine, mois après mois à visiter le prince des gnomes : il récupère de l’argent et il laisse des cheveux. Une année passe ainsi, deux, trois ; il n’a plus aucun cheveu sur la tête. Il se rend une nouvelle fois pour prendre de l’argent, mais il n’a plus de cheveux. « Ne veux-tu pas quelque chose d’autre ? demande-t-il. – Non, des cheveux, j’ai besoin de cheveux ». Et c’est là qu’il a compris que le caractère humain se cache dans ces cheveux. Il a sacrifié les petites choses pour celles qui lui semblaient plus grandes en apparence !

            Chaque cheveu est une noble pensée sacrifiée pour rien. Si vous avez dix ans durant un tel élan, vous sacrifiez tout ce qui est noble en vous et vous finissez nu et dépouillé comme un désert. Alors vous vous transformez en un grand arbre vieux et desséché, symbole du caractère d’un homme déchu.

            Ne nous offensons pas de la vérité. Je sais, beaucoup se fâchent lorsqu’on leur dit la vérité, mais celui que la vérité vexe est un vieillard aux yeux de Dieu. Voilà la loi devant Dieu : le Seigneur ne s’est jamais vexé pour le moment. Aucune autre créature n’a subi plus d’outrages que Dieu, mais Il n’a jamais même froncé les sourcils. Il regarde calmement, doucement, et Il dit : « Ces enfants comprendront la loi ; ils amassent des péchés et c’est pour cela qu’ils porteront ce fardeau. – C’est dur, très dur, c’est la misère. Que ferons-nous ? – Vous travaillerez. – N’y a-t-il pas un autre moyen ? – Non, vous travaillerez. – Nous sommes adultes. – Vous prierez, vous deviendrez des enfants ».

Lorsque vous retournerez chez vous, tentez de redevenir des enfants et vous verrez comment vous rajeunirez. Vous êtes vieux, pourquoi ? Parce que vous portez le fardeau du monde sur vos épaules. Lorsque vous êtes sur un bateau pris dans la houle et que la peur vous saisit, qu’est-ce que cette peur vous apporte ? Restez calme, ayez confiance comme un enfant, Celui qui a créé le bateau prendra soin de vous. Le bateau s’agitera, puis finira par s’immobiliser. Il y a du tonnerre, de l’orage, ne craignez rien. Les oiseaux dans le ciel s’agitent aussi, mais ils comprennent cette loi mieux que vous.

Vous m’excuserez pour tout cela. Si vous êtes vieux, vous vous vexerez ; si vous êtes jeunes, je vous salue. Que personne ne le prenne mal lorsque je dis la vérité. Celui qui traverse pieds nus un endroit pierreux, je lui dirai : « Mets des souliers car tu blesseras tes pieds sur le trajet et tu seras contraint de rebrousser chemin ; les souliers te sauveront. » Si c’est une dame, elle préfèrera se blesser, mais rester sans souliers pour plaire à son chevalier servant. C’est dangereux de marcher pieds nus. Les enfants sont toujours chaussés. Voyez les papillons, ces petites créatures du Seigneur, voyez leurs magnifiques toilettes ; si une reine sur terre avait les mêmes, elle serait la plus heureuse qu’il soit. Le Seigneur les habille bien, même si leur vie est brève. Pourquoi le Seigneur les habille-t-il aussi bien ? Parce que ce sont des enfants. Et pourquoi le Seigneur afflige-t-il les adultes ? Parce qu’ils sont vieux. Pourquoi le Seigneur bénit-t-il certains ? Parce que ce sont des petits enfants. La mère pardonne les nombreuses erreurs de ses enfants, mais si son mari commet une faute elle dira : « Ce vieux, je ne le veux plus. » Ainsi, le Ciel pardonne tous les péchés aux petits enfants, mais il est inflexible envers les vieillards en disant : « Dehors ! » Alors, qu’est-ce que cela fait naître en nous ? Le ressentiment, le désespoir, la haine envers la vie, car nous rencontrons une résistance et des conditions défavorables pour notre développement. Pour être aimés de Dieu et des humains le seul remède est d’accueillir cette idée divine en nous : être petits devant Dieu, avoir un cœur et un esprit compatissant et accessible.

L’amour a des degrés d’intensité : si on se tient à deux mètres d’un poêle, on ressent une agréable chaleur, mais si on pose sa main dessus, on se brûle. Les vieillards sont des poêles chauffés à blanc, parfois ils brûlent ; ils sont en général intéressés. Ne pensez pas que je parle de vous ; je parle de ces vieillards évoqués dans les Écritures. Un vieillard est celui qui se croit grand, important et il faut s’en méfier. Voilà ce qu’a prôné le Christ en disant : « Devenez comme des petits enfants. » Si vous observez la nature, vous verrez que les choses précieuses ne sont pas volumineuses. Par exemple le diamant, la matière qui l’a formé jadis a été gazeuse, un gaz qui a occupé un grand volume et qu’il a fallu condenser. Le Seigneur l’a densifié, l’a transformé en corps solide tout en rétrécissant son volume ; il est devenu petit en taille, mais d’une grande valeur. Avez-vous une idée de l’énergie de la matière condensée dans un atome ? De la même façon, suivant la même loi, nous devons rapetisser, devenir petits comme des enfants, car seul Dieu est grand. Et pour être comme Lui, nous devons apprendre l’art des choses transitoires dans l’existence, les étapes transitoires de la vie : pourquoi les petites choses passent de petites à grandes. Une graine mûre, aussi petite soit-elle, lorsqu’elle tombe au sol, trouve des conditions pour son développement, alors qu’une feuille morte, un fruit pourri, aussi grands qu’ils soient, s’ils tombent au sol, se décomposent.

            C’est le sens des paroles du Christ. Il a parlé jadis pour les gens instruits de son époque, pour vous, pour ceux qui peuvent comprendre et appliquer Son enseignement. Pour ceux qui ne Le comprennent pas, qui ne peuvent pas appliquer Ses pensées, Il ne dit rien. Lorsqu’un grand musicien joue, il joue pour ceux qui ont une oreille pour l’écouter ; lorsqu’un sculpteur fait une statue, il l’expose pour ceux qui estiment et comprennent son art ; un écrivain qui écrit un livre, il a de l’importance pour ceux qui le comprennent. Le Seigneur a fait le monde et a écrit Sa loi pour ceux qui Le comprennent. Ceux qui ne Le comprennent pas porteront leur fardeau sur les épaules et seront de « grands » hommes. Jadis, à la création du monde par Dieu, les esprits qui sont descendus sur terre ont voulu être grands, imposants, c’est pourquoi ils avaient des corpulences énormes, et c’est pourquoi il y avait de si grands animaux. Si ces grands animaux avaient subsisté sur terre, ils l’auraient dépouillée et dévastée, et ils auraient tout mangé. Le Seigneur a dû enseigner à ces esprits incarnés à ne pas avoir de si grands corps, car la majesté d’une créature ne réside pas dans sa corpulence. Une idée est grande non pas lorsqu’elle est volumineuse, mais lorsqu’elle porte quelque chose d’important pour le développement des autres. Si vous plantez un noyer, dix à douze ans après il sera énorme, mais à sa mort il reviendra dans sa forme initiale. Je vous dis de devenir comme les petits enfants et de l’expérimenter. Implantez cette idée du Christ dans votre esprit et tâchez d’être petits devant Dieu. Imaginez que vous démarrez maintenant votre vie dans le Royaume de Dieu.

Vous pouvez penser que vous êtes des gens célèbres, émérites, mais combien de grands rois, de personnages illustres il y a eu jadis dont aucun souvenir ne subsiste à présent. Nous nous égarons en pensant que les gens qui nous entourent sont renommés ; l’avènement d’un malheur permet de mesurer cette notoriété. Il y a quarante ou cinquante ans, il y avait dans un village proche de Varna un fils de notable, très illustre, tout le monde le connaissait, il s’appelait Petran. Chaque semaine il rassemblait des convives pour festoyer, il égorgeait un agneau pour les nourrir, et les festivités duraient longtemps. Un malheur l’a frappé, il a tout perdu et s’est retrouvé dans la misère ; alors, on l’a abandonné. Ce Petran se croyait grand et illustre.

Qu’est-ce qu’un homme illustre ? C’est un bœuf mort. Les chiens se jettent sur sa carcasse et continuent de parler de lui tout en le dévorant ; et ensuite on n’entend plus parler de lui. Les gens disent : « Bla, bla, bla, » tant qu’il y a à manger, tant que tu les nourris ; lorsque tu meurs et que plus rien ne reste de toi, on arrête de parler de toi. Ce sont les malheurs de notre vie extérieure. Nous sommes très beaux en apparence, mais c’est l’autre beauté qui importe, celle du cœur et de l’esprit. C’est pourquoi, purifiez votre cœur et votre esprit sans vous laisser leurrer par le « bla, bla, bla… ». Devenez des petits enfants pour entrer dans le Royaume de Dieu et hériter de la vie nouvelle. Les humains sur terre sont morts, et les chiens, les corbeaux, les rapaces les dévorent car ils sont « grands ». Lorsque vous lirez L’Apocalypse - le livre de la Révélation - vous verrez que le Seigneur appelle tous les rapaces et leur dit : « Venez, petits, disposer de votre part, venez vous rassasier de la chair des valeureux, ces grands hommes. »[3] Que signifie cela ? Lorsqu’un grand chêne décrépit et se transforme en terre, le Seigneur envoie de petites graines et herbes et leur dit : « Prenez votre part de ce chêne, car il vous empêchait jadis de vous développer. » C’est pourquoi le Christ dit : « Si vous ne devenez pas comme des petits enfants, vous ne rentrerez pas au Royaume de Dieu ; Dieu ne sera pas de votre côté. »

Dans vos nouvelles conditions d’existence vous devez adopter une nouvelle moralité, de nouveaux principes religieux, plus forts que les principes actuels. Ces principes dont vous vous êtes servi jusqu’à maintenant sont faibles, ils ne peuvent pas résister. Vous avez une corde qui peut soulever dix kilos, mais vous voulez soulever cent kilos, que faire ? Vous rendrez la corde dix fois plus résistante. La corde représente la moralité, elle doit devenir dix fois plus résistante que la moralité d’avant pour tenir le coup. C’est pourquoi nous devons modifier notre vision du monde selon cette loi. L’homme le plus mauvais, s’il devient un petit enfant, évoluera et vous l’aimerez.

Il n’y a pas de lutte entre un chêne et de l’herbe, mais entre deux chênes. Oui, plantez-les, l’un à côté de l’autre, vous verrez leur combat, qui l’emportera sur la taille, sur l’accaparement des rayons du soleil. Celui qui s’élèvera réussira, et celui qui restera en bas, dira : « Je suis resté petit. » Petit, mais avec de grandes idées. Tu n’es pas petit, tu attends simplement ton tour et tu diras : « Je serai ton fils, un fruit. » Et l’autre te dira : « Je suis ton père. – Père, je te remercie de tes soins à mon égard. » Et ce fruit sera un jour grand et échangera son rôle avec son père. Le Christ exige que chacun de nous soit une sorte d’arbre et que cet arbre donne du fruit, une graine sur laquelle fonder le Royaume de Dieu.

Vous direz : « Ces choses sont abstraites. » Non, implantez cette idée : « Je veux devenir un petit enfant divin, aide-moi, Seigneur Dieu, à réaliser cette pensée. » Méditez douze mois sur cette pensée et vous verrez le changement dans votre vie. Mais ne fanfaronnez pas là-dessus, je sais que vous êtes petits. Lorsqu’un grand hêtre vient dire : « Je suis petit », il ne dit pas la vérité ; lorsqu’un riche prétend ne pas avoir d’argent, c’est qu’il craint d’être cambriolé ; lorsqu’un pauvre dit qu’il a de l’argent, il ment aussi. Que chacun dise la vérité. Ayez foi dans cette grande loi divine sur l’enfant, et le Seigneur sera avec vous. Si Dieu vous fait crédit, Il vous fera grands, mais si vous vous croyez grands vous-mêmes, vous êtes comme ce marchand menteur qui prétend avoir de l’argent alors qu’il n’en est rien.

C’est le sens profond de ce verset : « Devenir comme les petits enfants. » Je ne veux pas que vous reteniez l’idée : « Nous ne sommes donc rien ? » Laissez cette idée de côté. Ce que vous avez été jusqu’à présent importe peu, c’est ce que vous serez désormais qui est important. On sait ce que les humains ont été jusqu’à maintenant, ne réveillons pas le mal. Soyons des petits enfants de Dieu, voilà le futur idéal. J’aimerais que vous soyez des enfants de Dieu pour utiliser les grands bienfaits que le Royaume de Dieu vous offre. J’aimerais que vous soyez tous intelligents, heureux et vertueux. Je vous dis ce que vous serez, et la manière de devenir ainsi. Vous direz : « Comment considérer cette petite goutte d’eau ? » Ne vous inquiétez pas, elle va grossir, la pluie ne tombe pas d’un seul coup, mais tout doucement, puis forcit progressivement. Mais ces petites gouttes d’eau apportent leurs bienfaits dans le monde. Les petits enfants ne connaissent pas la peur, ce sont leurs grand-mères qui leur font peur : « Le loup garou viendra te manger. » Les domestiques aussi, pour pouvoir sortir à un rendez-vous galant, font peur aux enfants avec le loup garou pour les mettre au lit plus vite. Les mères, pour aller au bal, leurrent aussi les enfants en leur faisant peur avec quelque monstre. À bas vos épouvantails, ne trompez pas les petits enfants, ne vous leurrez pas vous-mêmes ! Soyez honnêtes envers vous-mêmes et envers les autres, c’est la seule manière de vous rajeunir et d’embellir. Lorsque l’idée divine viendra en vous, vous serez transformés, la bouche, les sourcils, tout. En Europe, on refait ses lèvres plus rouges car la rougeur symbolise la richesse et la bonne santé. Laissez-les plutôt venir de façon naturelle. Être de petits enfants signifie cesser de leurrer Dieu.

Quelqu’un ne croit pas en Dieu ; il peut avoir de sérieuses raisons pour son incrédulité. Quelqu’un dit : « Dieu n’existe pas. Je dirais plutôt que tu n’as pas actionné l’interrupteur. – La vie n’a pas de sens. – Tu n’as pas actionné l’interrupteur. – Mais les humains sont mauvais. – Tu n’as pas actionné l’interrupteur. » L’interrupteur du petit enfant est à l’intérieur et il n’y a pas plus belle, plus fidèle idée que celle-ci.

Certains veulent savoir qui est le Christ. Les paroles qu’Il a prononcées, voilà le Christ. Est-ce que vous pouvez employer ces paroles pour être heureux, voilà le Christ. La force de la vie n’est pas dans la lettre mais dans l’Esprit. Je suis attentif, respectueux de la vérité divine, je dis toujours ce qui est vrai. Nous ne devons pas être comme ce disciple de Socrate qui, pour se montrer humble, est allé un jour auprès de son maître avec un pantalon déchiré. Alors, le maître lui a dit : « Ton orgueil transparait même à travers les trous de ton pantalon. » Nous devons être attentifs. Comme vous le constatez, je suis vigilant par rapport à vos cœurs, je n’ai jamais dit ce qui n’est pas vrai. Tout ce que je vous dis est vrai, vous pouvez le vérifier. Si vous n’avez pas de résultat, je m’y attèlerai avec vous. Dites-vous seulement : « Cette année, je veux être un petit enfant de Dieu. »

Je vous renvoie chez vous avec cette idée : être de petits enfants de Dieu. J’aimerais que tous les Bulgares soient de petits enfants de Dieu. J’aimerais que tous les états d’Europe soient de tels enfants, il régnerait alors la véritable paix divine dans le monde.

 

Sofia, 11 février 1917


[1] « En vérité, je vous le déclare, si vous ne changez et ne devenez comme les enfants, non, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux. » (Matthieu 18, 3)

[2] Jésus lui répondit : "En vérité, en vérité, je te le dis : à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu." Nicodème lui dit : "Comment un homme, pourrait-il naître s’il est vieux ? Pourrait-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère, et naître ? (Jean 3, 3-4)

[3] « Alors je vis un ange debout dans le soleil. Il cria d'une voix forte à tous les oiseaux qui volaient au zénith : Venez, rassemblez-vous pour le grand festin de Dieu, pour manger la chair des rois, la chair des chefs, la chair des puissants, la chair des chevaux et de ceux qui les montent, la chair de tous les hommes, libres et esclaves, petits et grands. » (Apocalypse 19, 17-18)

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