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Une conversation avec T.P. Le conte du palais de glace


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UNE CONVERSATION AVEC T.P.

LE CONTE DU PALAIS DE GLACE

Le Maitre était extrêmement tolérant envers toutes les doctrines, Écoles ou Sociétés existantes, mais il était catégorique quand il fallait démasquer les mensonges furtivement insérés dans leurs dogmes et instaurés soit dans un but intéressé, soit par suite d’un fanatisme obscurantiste. Une fois, quand il fut question de la littérature et de la doctrine théosophiques, que presque tous les disciples de la Fraternité ont utilisées à cause de leur conformité avec les Vérités d’Hermès Trismégiste (que l’on estime être le fondateur des sciences occultes), le Maitre non seulement ne nia pas l’importance de cette littérature, mais de plus, il la recommanda, toutefois en ne manquant pas de souligner qu’il était indispensable que, dans l’occultisme, tout soit transposé sur la base de l’absolue perfection de l’Enseignement du Christ. La base de cet enseignement est non seulement les connaissances, dont on parle si souvent dans l’occultisme, mais le développement de toutes les Vertus, parmi lesquelles il plaçait en premier lieu l’Amour envers Dieu et l’Amour envers le prochain.

Au cours d’une conversation sur ce sujet, un de nos frères, T.P. de la ville de Yambol, parla au Maitre des impressions que lui avait faites le livre Le Crédo chrétien de Leadbeater et plus spécialement du passage où il relate qu’au moment où il consacrait le pain et le vin de l’Eucharistie, il aurait vu le Christ sortir du calice. (On doit préciser que Leadbeater était non seulement un théosophe, mais aussi un évêque de l’Église anglicane.)

Le Maitre resta silencieux quelques instants, puis d’une voix sérieuse, mais douce il dit:

« Chaque printemps, je vois le Christ sortir des calices des fleurs sur terre et des arbres. Si Leadbeater ne voit le Christ sortir que du calice du Saint Sacrement, c’est peu. »

Ces paroles du Maitre contiennent le vaste diapason sur lequel il dispose ses conceptions du monde et de la vie. C’est ainsi qu’il voit et comprend le Christ. Pour lui, le Christ est la réincarnation de l’Esprit Universel qui participe à la vie, non seulement de l’homme, mais aussi de la nature tout entière. Pour le Maitre, le Christ est la manifestation de Dieu la plus complète, la plus grande et la plus universelle dans tous les domaines de la Création.

Pour tous les disciples du Maitre et pour ceux qui venaient lui rendre visite, il était clair que l’enchantement que le Maitre éveillait dans l’âme de son interlocuteur provenait directement de sa présence. Ce ravissement se déversait comme un fluide, comme un torrent invisible de forces et de certitude qui guérit l’homme de ses indispositions et aide à surmonter les difficultés et les contradictions. Ce torrent agit de la même façon que les champs de force. Plongé dans cette influence, l’homme acquiert l’assurance que dans le vaste océan houleux où règne le doute et les paroles de l’homme ne sont le plus souvent qu’un paravent, derrière lequel se cache la tromperie, devant lui se trouve un homme auquel on peut tout dire et qui sait vous dévoiler, à l’aide de mots compréhensibles, des vérités plus de mille fois éprouvées.

Avec le Maitre, on pouvait parler tout à fait aisément et sans la moindre gêne, même des évènements les plus ordinaires de la vie. La manière dont il pouvait tirer une sage leçon des choses les plus banales de la vie quotidienne et la suggérer à son interlocuteur par des sentences spontanément énoncées était toujours très intéressante et utile.

Ce même frère T.P. racontait ce qui suit:

En 1925, un grand nombre d’émigrés russes arrivèrent à Sofia. Toute une série de raisons politiques et personnelles avaient contraint ces gens à rechercher l’hospitalité de la Bulgarie. Un de ces émigrés s’installa dans un logement dans le même immeuble où logeait à cette époque T.P. En principe, le Bulgare est hospitalier et, sinon toujours du moins dans certains cas, il fait preuve de beaucoup de confiance envers ceux avec lesquels il se lie. Avec les Russes, qu’il considère comme proches et de la même parenté ethnique, il est souvent très ouvert et tout spécialement confiant. C’est ainsi que notre ami et frère se lia avec l’émigré russe d’une amitié très cordiale.

Un beau jour, le Russe pria T.P. de lui trouver 10 000 levas, car il avait l’intention et une possibilité sure d’ouvrir un restaurant. Pour commencer, notre frère réfléchit longtemps, puis il le prit en pine et, après avoir reçu des assurances pressantes que son argent ne serait pas perdu, il emprunta lui-même 10 000 levas de cette époque, somme pour laquelle il signa des traites. Le Russe Konstantinovitch ouvrit réellement un restaurant et commença à faire de bons bénéfices. Ce restaurant commença à être très fréquenté. Konstantinovitch engagea un ensemble de balalaïkas qui attirait la clientèle. Très rapidement, le piteux émigré commença à éprouver des sentiments de maitre. À plusieurs reprises, notre frère pria son nouvel ami de lui donner un peu d’argent pour qu’il puisse amortir sa dette, mais celui-ci lui répondait à chaque fois qu’il n’était pas en état de se priver de cette somme. Il lui fallait amplifier l’aménagement de son restaurant.

Il arriva que T.P. dut s’absenter de la ville pour un certain temps et, à son retour, il eut à faire face à une grande surprise: Konstantinovitch avait disparu de Sofia. Après avoir abandonné son restaurant, il avait quitté le pays ! Et c’est notre frère T.P. qui dut payer tout l’argent emprunté.

Un jour, le frère T.P. vit le Maitre dans la prairie de l’« Izgréva » et éprouva le désir de lui confier sa mésaventure et la grande déception qu’il avait vécue. Il se dirigea vers lui et, avant même qu’il commence à lui raconter ce qui lui était arrivé, le Maitre l’accueillit en lui disant avec une vive insistance, mais le visage illuminé d’un doux sourire :

—    Il n’est pas permis à un disciple de l’École occulte de faire du commerce, sous quelque forme que ce soit.

Après cet avertissement, il énonça ces paroles remarquables :

—    N’offrez pas de festins aux loups ! Ne contractez pas d’accord avec le renard ! Ne vous liez pas d’amitié avec les ours ! N’entrez pas en compétition avec les lions ! Ne jouez pas avec le serpent !

Puis, il sourit, fit un geste de la main et s’éloigna.

Après cette conversation, notre frère, quoique dupé, ressentit une grande tranquillité. On ne sait comment, mais depuis ce moment-là il se mit à lui sembler que ces 10 000 levas n’étaient pas une si grande somme perdue, en comparaison de la belle leçon qu’il avait reçue à travers les sentences originales émises à cette occasion.

Le frère T.P. se mit à réfléchir et comprit que les loups, les renards, les ours et tous les autres animaux, avec leurs qualités spécifiques, vivent en l’homme en tant que traits spécifiques et parties intégrantes de son caractère. Alors, il se souvint des paroles que le Maitre avait dites dans une de ses conférences : « Sur la terre naissent quatre sortes d’âmes : les âmes angéliques, humaines, animales et sataniques. Faites attention à qui vous avez affaire. »

 

*

* *

Chaque personne qui avait eu une conversation avec le Maitre devenait convaincue qu’elle avait affaire à un représentant d’un monde supérieur où il n’existe aucun leurre. Chacun recevait la confirmation ou bien l’avertissement qu’une pensée, un sentiment ou une action erronés entrainent inéluctablement la déception, et cela devenait tout à fait évident et ne prêtait à aucun doute. Une telle action ne pouvait être exercée que par la sagesse émanée des mots bienveillance et puissance.

L’attitude du disciple envers son Maitre, l’influence silencieusement exercée sur lui, sont d’une nature tellement irrationnelle qu’elles ne se prêtent pas à un examen et ne peuvent pas être traitées comme ces choses de la vie quotidienne qui ne demandent pas de preuves évidentes et banales.

Un unique contact avec le Maitre était suffisant pour qu’on comprenne qu’il n’était pas une personne ordinaire. Les disciples ressentaient cela le plus fortement, tandis que ceux qui n’étaient pas initiés aux connaissances spirituelles ressentaient l’extraordinaire en lui comme un charme spécifique de sa nature.

Le concevant ainsi — en tant qu’un homme possédant une vie spirituelle riche, puissante et inépuisable et connaissant parfaitement tous les états humains — le peintre Boris Gueorguiev l’a peint les yeux fermés, concentré en lui-même, rayonnant d’une lumière intérieure.

Même pour les personnes possédant une sensibilité bien moindre, le Maitre apparaissait comme une lumière leur permettant de lire la dure et difficile écriture de la vie. Par contre, ceux de ses visiteurs qui se rendaient chez lui, avec les portes et les fenêtres de leur âme fermées, dans [’intention de l’observer, afin de pouvoir écrire quelque absurdité dans la « presse jaune », sentaient comment il se renfermait en lui-même et se transformait en un miroir dans lequel ils voyaient leur propre néant spirituel.

S’il est nécessaire de donner quelques traits caractéristiques de son apparence, on peut dire que le Maitre était d’une taille moyenne. Son corps était harmonieusement développé et donnait l’impression de répondre à la règle d’or de la Géométrie vivante. Il se tenait toujours très droit. Sa démarche était toujours pondérée, élégante et belle, ses gestes harmonieux et élégants. Lui, dont la barbe et les cheveux étaient devenus blancs, donnait l’impression d’un homme qui avait gardé toute sa jeunesse. Jusqu’à la fin de sa vie, il garda cet aspect.

Le Maitre Beinsa Douno avait un regard doux, chaleureux, qui remuait l’âme. La lumière de ses yeux pénétrait profondément son interlocuteur. Cette lumière apportait la paix et la tranquillité. Cependant, dans ses conférences, quand il abordait des sujets concernant le mensonge et la perfidie dans notre vie contemporaine, ou bien s’il évoquait des paroles sacrilèges contre ce qui est Sublime et Saint dans la Création, alors la douce lumière qui émanait de son regard se transformait en éclairs issus des nuées de la noble colère Divine.

Le Maitre connaissait toutes les profondeurs de l’âme humaine. II savait immédiatement à quel niveau était parvenu celui qui venait auprès de lui, et il agissait en conformité avec ce que ses yeux spirituels avaient vu, sans porter atteinte à la liberté de cette personne et sans projeter sur elle l’ombre de son autorité.

Mettant toujours en pratique les commandements du Christ qui avait dit : « Je ne suis pas venu pour les Justes, mais pour appeler les pécheurs à se repentir », le Maitre accordait plus d’attention à ceux qui, enchevêtrés dans les mirages du péché aux nombreuses facettes, recherchaient leur libération. Pour lui, tout dans cette vie était une parcelle plus ou moins grande de l’évolution et il avait le don d’éclairer et d’expliquer avec sa sagesse toutes les choses qui semblaient de peu d’importance. Le Maitre pouvait faire cela car, bien qu’extérieurement il apparaissait comme un homme ordinaire, il vivait dans des régions inaccessibles pour les non-initiés, et c’est pourquoi ses prévisions, ses conseils, ses décisions et ses actions nous paraissaient souvent surprenants. C’est plus tard, quand les évènements confirmaient tout ce qu’il avait dit, que nous saisissions mieux ce qu’il était.

Le Maitre avait libre accès à des mondes étrangers aux personnes ordinaires, et c’est pourquoi il pouvait connaitre le passé, le présent et l’avenir d’individus particuliers, mais aussi ceux de peuples tout entiers. Il savait quelles choses étaient karmiquement inévitables et celles qui pouvaient être conjurées. À cause d’un avertissement qu’il avait fait parvenir au roi Ferdinand de Bulgarie, par l’entremise de personnalités proches de la cour royale, l’avertissement (au moment de la Première Guerre mondiale) que l’entrée en guerre de la Bulgarie amènerait une catastrophe, le Maitre fut interné dans la ville de Varna. Plus tard, les évènements qui arrivèrent prouvèrent clairement qu’il avait vu juste.

Pour préciser les traits spirituels du Maitre, nous ajouterons encore ces quelques mots qu’il avait donnés comme réponse :

« Certains de mes amis veulent voir en moi les manifestations du

Christ. Non, ce n’est pas juste. Vous ne trouverez le Christ que dans Son Enseignement. Si vous désirez savoir qui je suis, je vous répondrai : Je suis le frère des plus petits dans le Royaume de Dieu. Moi, le plus petit, je veux accomplir la volonté de Dieu, sanctifier Son nom et Le remercier avec toute ma gratitude. »

« À ceux d’entre vous qui connaissent la vérité des sciences occultes, je dirai ce qui suit: ce qui est caractéristique pour notre époque, c’est que nous entrons sous l’influence du “Verseau”. Les énergies spécifiques de ce signe zodiacal sont dirigées vers notre planète pour y créer une Culture nouvelle. Si conservateurs que puissent être les gens de cette importante partie des habitants terrestres qui cherchent à arrêter la venue des flots de rénovation, leurs efforts resteront stériles. Le plan cosmique est au-dessus de tous les plans humains et les efforts pour conserver l’ancien ordre des choses paraitront ridicules. Si sévères, catégoriques et menaçantes que soient les lois et les sanctions des partisans fanatiques des régimes politiques, insensiblement, tout doucement, mais avec une puissance intérieure, le “nouveau” s’empare de l’esprit et de la volonté des hommes. Partout, dans la pensée philosophique, dans les sciences, dans la littérature, tout comme dans tous les autres arts, on perçoit les éléments d’une nouvelle conception du monde, et celle-ci vient de l’intérieur, comme une visite. Les anciennes conceptions sont inaptes et absurdes face aux pas gigantesques faits par la Science et devant la nouvelle sensibilité de certains individus des jeunes générations. Des vérités qui, jusqu’à présent, étaient considérées comme des crédulités ou des absurdités prennent déjà l’aspect d’une réalité, tandis que le mot même de réalité, insensiblement, mais rapidement, élargit ses limites. »

L’humanité parait saturée des explications de la vie, dénuées de fondements, ajustées d’une manière artificielle, ayant pris naissance depuis plus d’un siècle, alors que pendant ce temps la pensée humaine qui avançait devait lutter contre les superstitions et le fanatisme du Moyen Âge. C’est justement pour ce temps que fut créée la doctrine matérialiste qui a déjà vécu et qui est tout à fait inapte face aux besoins de la nouvelle époque.

Les défenseurs persévérants de ce qui est ancien, qu’ils soient des dogmatiques religieux ou bien des athées, luttent pour ne pas reculer de leurs positions, car ils savent que le nouveau qui vient va non seulement aérer leurs antres, mais qu’il va emporter dans son souffle leur philosophie. Ils ressemblent à ces souverains au sujet desquels le Maitre nous parlait. Pour mieux illustrer la manière imagée et pleine de véracité de ses paroles, nous estimons qu’il est bon de citer ici l’histoire du « Roi des glaciers » qu’il nous avait racontée au cours d’une conversation impromptue.

II y avait une fois un souverain riche et puissant, mais très capricieux, c’était pendant un hiver rigoureux, et la terre était recouverte d’énormes blocs de glace. Cet amateur de glaciers fit appeler des serviteurs et leur ordonna de lui trouver le meilleur artisan pour qu’il lui construise un palais merveilleux avec cette glace. Cet impitoyable souverain pensait que cet hiver, si rude et si glacial, ne s’en irait jamais. Ses conseillers, plus sensés, furent fort surpris. Mais personne n’osa lui dire qu’un palais, tel qu’il le désirait, ne pouvait pas durer longtemps. Ils firent donc venir les plus renommés artisans du pays et, parmi eux, ils choisirent le meilleur. II n’y avait pas moyen de faire autre chose. Les ouvriers aux ordres du constructeur en chef commencèrent à scier les blocs de glace et à les arranger comme il le leur commandait.

II ne se passa pas longtemps et, au centre de l’empire du tyran, fut érigé un immense et merveilleux palais. Froid et menaçant, il attirait l’attention des gens, surtout de ceux qui avaient du gout pour la haine. De tous côtés, le pâle soleil d’hiver le faisait resplendir de reflets bleu vert, mais il ne pouvait rien changer à sa splendeur fallacieuse. De son côté la lune, pendant les nuits claires, avec sa lumière phosphorescente, créait des spectacles féeriques.

« Quelle splendeur ! Quelle merveille ! » disaient les gens, en regardant les tours et les arches, frangées de guirlandes en givre, qui se dressaient vers le ciel glacial.

Mais cela ne dura pas longtemps. Un jour, les nuages ouatés qui recouvraient le ciel se déchirèrent. La lumière se mit à resplendir et, dans les jardins du tyran le merle se mit à chanter. Soudainement, des vents chauds soufflèrent. Alors le splendide édifice en glace commença à se déformer et à perdre sa beauté.

«Apportez des chaines et des cordes pour consolider mon palais ! » hurlait le tyran fou de colère, et toutes ces centaines d’ouvriers commencèrent à consolider les voutes, les colonnes et les tours.

Cependant le printemps approchait. Chaque nuit le vent du Sud soufflait de plus en plus fort et chaque matin de nouveaux groupes d’oiseaux arrivaient avec de joyeuses trilles et chants. L’édifice de glace devenait de jour en jour plus piteux et s’affaissait d’une manière menaçante. Le souverain hurlait, menaçait, faisait pleuvoir les punitions

sur les ouvriers, parce qu’ils n’arrivaient pas à sauver son palais bienaimé, mais cela n’y changeait rien.

Une nuit, la douce chaleur du printemps parvint au-dessus du sombre empire, et le palais de glace s’effondra dans un grondement affreux et un grincement des chaines qui le soutenaient. Tout ce fracas réveilla les gens au milieu de leur sommeil.

Le lendemain, parmi les mines hideuses, au milieu des cordes et des chaines en fer, les eaux d’un ruisseau murmuraient. II s’élançait joyeusement vers la vallée, sous le soleil souriant avec magnanimité.

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