Jump to content

1916_12_31 Rendez à Dieu ce qui est à Dieu


Ani
 Share

Recommended Posts

Rendez à Dieu ce qui est à Dieu

 

Alors il leur dit : Rendez donc à César ce qui est à César,

et à Dieu ce qui est à Dieu.

Etonnés de ce qu'ils entendaient,

ils le quittèrent, et s'en allèrent.

Matthieu 22 :21,22[1]

 

         « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » Sans le vouloir le Christ a abordé une question de société : faut-il ou non payer une dîme. Cette question a toujours occupé les hommes. Elle peut être examinée au sens large comme au sens propre et le bonheur de l’homme dépend de la bonne résolution de cette question. C’est une équation complexe à dix inconnues. Les élèves résolvent facilement des équations avec une, deux ou trois inconnues ; mais face à des problèmes avec plus de trois inconnues, ils battent en retraite. Sauf que la vie soumet aux hommes des problèmes complexes à dix inconnues, voire davantage. Des milliers d’années sont nécessaires pour résoudre ces problèmes. Tous se lamentent et craignent l’inconnu.

         On a demandé au Christ : « Faut-il payer un tribut à César ? » Il a répondu fermement : « Payez ! » Dans tout ce chapitre le Christ a exprimé de grandes idées qu’il faut creuser longtemps, comme un botaniste ou un géologue doit longtemps étudier une plante ou un minéral pour le connaître. Ce n’est pas facile de pénétrer le sens profond des versets dits par le Christ. Beaucoup des chrétiens d’aujourd’hui s’assoient sur une chaise et réfléchissent à la compréhension de telle ou telle question. Penser ne suffit pas pour répondre aux questions : il faut des efforts, du labeur, du travail. La femme demande : « Faut-il cuisiner pour mon mari ? » Le Christ répond : » Oui, il le faut, l’homme est ton César, il faut cuisiner pour lui. » Lorsque tu lui feras à manger, il sortira travailler et tu resteras seule à la maison et tu pourras servir Dieu. La femme dit : « Ah, si j’étais un homme ! » Même si tu es un homme, tu rendras à la femme de César ce qui lui appartient ; il y a donc César et sa femme. Si tu es un homme, tu rendras à la femme de César ce qui est à elle, et à Dieu, ce qui est à Dieu. La même chose est demandée à l’homme et à la femme. En d’autres termes, en tant qu’humain tu as une obligation envers ce monde que tu habites, mais aussi envers Dieu. Si tu vas au bal, tu te conformeras à l’étiquette : la femme doit s’habiller selon la mode, avec une robe blanche, claire, avec des chaussures spéciales, elle doit se maquiller, etc. ; l’homme s’habillera en costume sombre, avec de nouvelles chaussures, il mettra des gants blancs.  « Je n’aime pas ces choses. » Si tu ne les aimes pas, ne va pas au bal. Si tu vas auprès du Seigneur, il faut mettre un collier autour de ton cou, un diadème sur ta tête, un bracelet à ton poignet. Le collier autour du cou, c’est l’amour, le diadème dans les cheveux, c’est la sagesse, le bracelet au poignet ou à la cheville, c’est la vertu. En Roumanie, certaines femmes portent des montres à la cheville et pour consulter l’heure elles lèvent la jambe : cela choque certains…

         Je dis : donnez à César ce qui est à César ; vous êtes sur la terre, c’est la vie sur terre qui exige cela. Quelqu’un est en colère, envieux, et ne peut accepter la vie ; s’il ne peut pas l’accepter ici, qu’il aille au Ciel ! Celui qui s’insurge contre le manque de sucre, contre la maigre ration de pain – un quart de kilo – qu’il aille au Ciel, que vient-il chercher sur terre ? Donnez à César ce qui est à César : il faut lui payer son tribut, cela et rien de plus.

         La première tâche de l’homme est de résoudre correctement les questions de la vie. Dans l’accomplissement de cette tâche réside la force de la vie elle-même. Celui qui ne peut appréhender ce qu’est la vie est un pygmée, une nullité, un microbe. La question ne se résume pas à se rengorger comme certains serpents, gallinacées, dindons : il suffit de s’en approcher pour qu’ils se mettent à se pavaner. Ne leur en tenez pas rigueur, c’est leur compréhension, et ils agissent en conséquence. Et vous non plus, ne soyez pas fâchés d’entendre la vérité. Je dis : tant que vous êtes sur terre, pensez et travaillez pour résoudre correctement les questions de la vie.

         Lorsque Dieu a chassé l’homme du Paradis, il a laissé dehors un ange comme gardien. Que gardait-il ? La raison de l’homme, c’est-à-dire le commencement divin : la raison est restée au Paradis. Le serpent a trompé Ève qui a goûté le fruit défendu, puis elle l’a donné à Adam aussi pour qu’il en mange. Alors Dieu les a chassés du Paradis en disant : « Puisque vous ne méritez pas la vie, vous quitterez le Paradis. Un jour lorsque vous comprendrez la vie, vous reviendrez à Moi. » Les gens veulent être heureux ; il n’y a pas de bonheur pour ceux qui dilapident la fortune de leur père. Je ne vous accuse pas, simplement je clarifie un principe ; il n’y a pas de quoi s’offenser. Vous qui êtes assis devant moi, vous n’êtes pas encore les vrais humains. Je vois devant moi des personnes habillées, avec un poids et une forme donnés, mais ce n’est pas l’humain. J’ai une haute opinion de l’humain ; il se cache en vous quelque chose de grand dont vous n’êtes pas conscients. Un jour le divin en l’humain se manifestera et vous comprendrez ce qu’est la vie, ce qu’est l’être humain lui-même.

         Le Christ dit : « Donnez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. » Lorsque vous donnerez à César ce qui est à lui, vous vous libérerez. Chaque mauvaise pensée, chaque mauvais désir ne sont pas à vous mais à César, rendez-les-lui. Qui est César dans l’être humain ? Le diable. Tu dis : « Aujourd’hui je me suis fâché. » As-tu rendu à César ce qui est à César ? Rends à César ce qui est à César. Mais ne rendez pas uniquement à César ce qui est à César, rendez aussi à Dieu ce qui est à Dieu. Le César symbolise notre côté humain, nous devons donc rendre à chaque être humain ce que nous lui devons. C’est cela comprendre le sens de la vie.

         Un ermite a vécu de nombreuses années dans le désert. Il a enfin décidé de voir un saint et de lui demander comment comprendre le sens de la vie. Le saint lui a dit : « Va dans le village le plus proche passer une journée entière parmi les paysans pour voir ce que tu apprendras d’eux. » Arrivé au village, l’ermite s’est retrouvé dans la maison d’un paysan qui s’apprêtait à aller au champ. Il a décidé de l’accompagner. En partant le paysan a dit : « Seigneur ! » Il a travaillé toute la journée, a labouré, a semé et de retour à la maison, il s’est reposé un moment, puis il a dit encore : « Seigneur ! » L’ermite est retourné voir le saint pour lui faire le récit de la journée passée au village. « Qu’y as-tu appris ? – Rien de particulier, j’ai vu un paysan qui a prononcé à deux reprises dans la journée le nom du Seigneur. »

         Le saint a alors donné à l’ermite une lampe remplie d’huile en lui disant : « Tu feras le tour du village avec cette lampe en faisant attention de ne pas renverser une seule goutte d’huile. » L’ermite s’est acquitté de ce travail et est revenu voir le saint qui lui a demandé : « Combien de fois as-tu eu une pensée pour le Seigneur ? – Pas une seule fois. – Pourquoi ? – Toute mon attention était centrée sur la lampe car je tâchais de ne pas en renverser une seule goutte. » Alors le saint a conclu : « As-tu remarqué que le paysan qui nourrit sa famille et nous-mêmes a trouvé le temps de penser deux fois au Seigneur alors que toi, l’ermite, tu n’y as pas pensé une seule fois ? »

         Je demande : les scientifiques et les philosophes modernes, combien de fois par jour ont-ils une pensée pour le Seigneur. La raison des malheurs des gens d’aujourd’hui réside dans le fait qu’ils ne pensent pas au Seigneur. C’est pourquoi le Christ dit : « Donnez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » Je dis : vous devez penser à vous, à vos membres, à votre intelligence, à votre cœur, à votre développement, mais vous devez aussi penser à ce qui est élevé, à améliorer la vie qui vous attend après la mort. La vie d’aujourd’hui est à nous, celle de demain appartient à Dieu. Comment serez-vous heureux si vous ne donnez pas à Dieu ce qui est à Dieu ? Le malheur des gens est qu’ils ne donnent qu’à César, or il ne fait que prendre, il ne donne pas. Dieu se distingue par ce qu’il donne et prend : Il prendra son enfant à une mère, mais il lui en donnera un autre, meilleur, deux ou trois ans plus tard. Un homme bat sa femme. Dieu prendra cet homme et lui enverra un autre mari, meilleur que le premier. Ainsi, si Dieu vous enlève quelque chose n’ayez pas de regrets. Il est doux, juste et miséricordieux ; en échange de ce qu’il a pris il vous rendra quelque chose de mieux. De ce point de vue le Seigneur est un exemple pour nous.

         Le Christ dit : « Que vos affaires soient si florissantes que quiconque vous voie, bénisse votre Père. [2]» Pourquoi le monde ne s’est pas arrangé jusqu’à maintenant ? Parce que vos affaires ne glorifient pas le Seigneur. La responsabilité repose sur les épaules des scientifiques et des religieux. Il y a beaucoup de scientifiques sur terre qui ne le sont pas au Ciel ; il y a beaucoup de saints sur terre qui ne le sont pas au Ciel ; beaucoup de gens nobles sur terre ne le sont pas au Ciel : apparence et essence ne sont pas la même chose. Pour aller sur le droit chemin, l’homme doit distinguer ce qui est essentiel de ce qui ne l’est pas. L’homme doit être libéré de toutes les ambitions de domination et de possession.

         Ainsi, quatre choses sont nécessaires à l’homme pour entrer dans le droit chemin : distinguer l’essentiel de ce qui ne l’est pas, s’affranchir des ambitions personnelles, avoir de bonnes intentions et une vie vertueuse, et avoir de l’amour en lui. Tant qu’il n’acquiert pas ces choses, l’ange ne le laissera pas entrer au Paradis. Le Seigneur dit : « Vous avez appris à servir César et pas Moi ; même si cela vous fâche, je ne peux pas vous accepter comme Mes serviteurs. » Quel grand musicien acceptera votre enfant immature pour commencer des cours de musique ? Il dira : « Je n’ai pas le temps de m’occuper de vos enfants. » En s’écartant de l’ignorance, Dieu a laissé les ignorants errer dans leur obscurantisme. Puisque les gens sont aujourd’hui plus enclins à Le comprendre, Il envoie son Fils parmi eux.

         Que fait l’homme moderne ? En se levant le matin, il se lave, il se brosse, s’habille proprement et puis se met au travail. Son premier travail est de servir César. Ainsi il se demande : « Dois-je servir César ? » Oui, tu le serviras car tu es dans son royaume : tu seras juste. Quelqu’un dit qu’il ne faut pas prendre soin de son corps. « Qui te dit cela ? Si tu loues une maison, tu dois la nettoyer et l’entretenir. – Je suis un saint homme. – Que tu sois un saint ou non, il faut te nettoyer ; si tu es venu sur terre, même saint, tu dois te nettoyer. » Le maître met une mauvaise note à l’élève et celui-ci est mécontent du maître et menace de le frapper : beaucoup de maîtres sont battus par leurs élèves. Je dis à l’élève d’étudier pour ne pas avoir de mauvaises notes ; je dis au maître de tester plusieurs fois son élève avant de le noter. Le maître doit être raisonnable à tout point de vue. Lorsqu’ils vivent bien, l’élève et le maître posent une meilleure base d’entente.

         Dieu est miséricordieux et doux, mais si tu Le sers, tu Le serviras en Esprit et en Vérité ; il faut de la perfection pour cela. C’est facile de servir Dieu à condition d’avoir une aspiration intime et profonde pour cela ; sans cet élan, c’est difficile de servir Dieu. Tu dis : « Je veux aller chez le Seigneur et m’instruire auprès de Lui. » C’est possible, mais il faut être digne du Seigneur. Une femme maltraite son mari plusieurs fois par jour et veut pourtant aller auprès de Dieu ; cela ne se peut pas. Pourquoi ? Elle ne sait pas encore faire face à son mari. Un mari maltraite sa femme mais veut aussi aller auprès de Dieu ; le chemin vers Dieu est fermé. L’homme et la femme sont deux principes qui doivent se réconcilier : si tu es un homme, tu verseras ton tribut à la femme de César ; si tu es une femme tu verseras ton tribut à César. Ce qui se passe avec l’homme et la femme en tant que formes extérieures se passe aussi à l’intérieur de l’être humain : César et sa femme sont à la fois en dehors de l’être humain, mais aussi en son sein.

         Beaucoup disent que le monde est mauvais. Je ne crois pas cela, je pense plutôt que les êtres humains sont mauvais et que le bien et le mal dans le monde est à leur mesure : le monde est aussi mauvais que les gens le sont. Lorsque vous parlez du monde, comprenez votre monde intérieur, mais pas le monde créé par Dieu. Si tu es indisposé, ne pense pas que tous sont indisposés. Tu n’as pas le droit de te baser sur tes humeurs pour conclure sur celles des autres. Quant au César qui est en toi, tu seras attentionné et poli avec lui, tu lui donneras ton tribut, tu étudieras son caractère et agiras bien avec lui. « C’est un usurier. » Cela ne fait rien, tu t’excuseras d’être en retard et tu lui donneras l’argent. Tu ne l’insulteras pas, tu ne lui en voudras pas, mais tu resteras doux et apaisé. Si tu es nerveux ici, tu le seras aussi là-haut ; tu seras au Ciel comme tu es ici sur terre. Ils sont très sévères là-haut, ils peuvent te répudier pour un simple froncement des sourcils ou une grimace. Tu peux grimacer sur terre tant que tu veux, mais au Ciel ce n’est pas toléré. Pour une simple grimace un ange a été renvoyé sur terre pour y passer mille ans. Sur ce point César est plus laxiste, il ne voit pas les sautes d’humeur qui agitent l’être humain.

         « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », cela signifie : accomplissez votre mission envers Dieu. Sinon vous ressemblerez à cet américain qui avait vécu uniquement pour l’argent et qui, sur son lit de mort, conscient de sa situation a dit à ses fils : « Ne suivez pas mon exemple, je n’ai vécu que pour amasser ma fortune et je ne compte sur personne dans l’au-delà. Aussi, mettez dans mon cercueil toutes les sortes de devises que j’ai, pourvu qu’elles me soient utiles dans l’au-delà.

         Dans l’autre monde il a senti la faim et s’est arrêté sur un stand devant des poulets grillés, poissons, fruits. Il a demandé le prix du poulet. « Une roupie, tout ici est à une roupie. – Ça s’annonce bien, c’est si peu cher que je m’en sortirai facilement. » Et il a sorti vingt dollars en commandant tout sur la carte. « Nous ne connaissons pas ces billets, notre seule monnaie d’échange est la roupie. » Le riche est revenu vers ses fils, leur disant : « Ici, seules les roupies ont cours, envoyez-moi un sac de roupies. » Il a reçu les roupies et s’est rendu de nouveau au buffet. « Ce ne sont pas ces roupies-là qui ont cours ici ! » Et il s’est de nouveau fait chasser.

         « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » C’est le seul moyen pour l’homme de se libérer de la souffrance. Tous ceux qui partent dans l’autre monde sans s’y préparer souffrent. Ce qui est important c’est de vivre. Comment ? Avec discernement. Quelqu’un se met en colère pour pas grand-chose. Prenez exemple sur le Soleil : lorsque vous l’accueillez le matin, il vous sourit et vous salue. Le soir en se couchant, il vous tourne le dos ; faut-il se fâcher contre lui ? Vous êtes souvent fâchés les uns contre les autres sans raison. Vous vous fâchez de ne pas être reçus convenablement par les autres.

         Un écrivain s’est rendu dans la maison d’un riche pour lui emprunter de l’argent. Le riche s’est caché en disant à son domestique : « Dis-lui que je suis absent. » L’écrivain a entendu sa voix mais n’a pas bronché et ne s’est pas mis en colère. Un jour ce riche a eu besoin des services de l’écrivain. Il a toqué à sa porte et l’écrivain a ouvert, s’est montré et a dit : « Je ne suis pas là. – Comment ça, tu n’es pas là, je te vois et je t’entends et tu me dis que tu n’es pas là. – C’est curieux, a répondu l’écrivain, moi, j’ai cru les paroles de ton domestique, mais toi, tu ne crois pas mes propres paroles. Je suis là, mais pas pour toi. »

         Lorsque vous vous rendrez auprès du Christ, Il pourra vous dire : « Je ne suis pas là. – Comment ça, nous Te voyons ! – Je suis là, mais pas pour vous. »

         Sachant cela, ne te mets pas en colère contre le Soleil : il ne se lève pas et ne se couche pas. Le lever et le coucher ne sont qu’une illusion du fait de la rotation de la terre autour d’elle-même. C’est ainsi que tourne ma terre, votre terre. Si tu viens me voir, il faut que tu saches si ma terre tourne, si mon soleil se lève ou s’il se couche ; si mon soleil se couche, n’approche pas. On rend visite à quelqu’un avec ou sans raison, c’est pour cela que naissent les malentendus, les vexations, les souffrances. On dit : « Un tel est mort. » Il est mort car son soleil s’est couché. La mort sous-entend donc le coucher du soleil. D’un côté il se couche, et l’homme vieillit et dépérit, de l’autre côté il se lève, et l’homme naît. La vieillesse est à l’ouest et la jeunesse à l’est. Vous direz que c’est une allégorie. Non, c’est de l’alchimie. Un jour, lorsque vous apprendrez cet art, vous vous transformerez selon vos désirs : vous serez jeune ou vieux, homme ou femme. La même chose se passe au théâtre : le jeune se transforme en vieux, le vieux, en jeune ; c’est la loi des illusions.

         « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » Est-ce que les gens agissent ainsi, est-ce que les chrétiens agissent ainsi ? Certains chrétiens ne respectent pas cette loi et ils critiquent pourtant les autres, ce qui démontre qu’ils n’ont pas appris les lois qui régissent le monde. Le monde et les gens du monde sont à leur place, ils ont une grande prédestination. Je respecte les gens du monde, beaucoup parmi eux sont sincères : s’ils veulent dire quelque chose de négatif sur toi, ils le feront en face de toi et non dans ton dos – beaucoup parlent dans ton dos. Si tu dis quelque chose de négatif sur quelqu’un, sois sincère, sois gentilhomme, dis-le lui les yeux dans les yeux. Les gens du monde aiment la propreté, ils se lavent souvent, ils se changent souvent, puis ils se parfument : ils aiment les parfums des fleurs. Les religieux rejettent cela et le considèrent comme néfaste. S’ils ne se parfument pas, au moins qu’ils se lavent souvent pour ne pas sentir mauvais ! Nous devons nous transformer, c’est ce que le Christ a énoncé dans ses paraboles. « Lorsque le roi a appris que les convives du mariages refusaient de venir, il s’est mis en colère et a envoyé son armée pour tuer ces assassins et brûler leur ville »[3]

         Je dis : oubliez votre personnalité et raisonnez avec justesse. Vous me direz que je vous houspille ; je n’houspille personne, je ne suis pas envoyé pour cela, je ne connais pas cette manière de faire. Houspiller est un art délicat, c’est une opération chirurgicale qui demande de la foi et du courage. Ce dont je vous parle, ce sont des mathématiques supérieures qui manient les chiffres de 1 à 10. Lorsque vous comprendrez le sens intérieur de ces chiffres, vous déterminerez vos rapports envers Dieu et vos proches. Le plus grand nombre est l’unité ; si vous compreniez l’unité, vous comprendriez tous les rapports ; les autres nombres sont obtenus à partir de l’unité, par sa division en plus petits nombres.

         Ainsi, l’unité est l’arbre et les autres nombres sont les branches, les feuilles, les boutons, les fleurs de cet arbre. Comme il ne connaît pas sa valeur, l’homme est bruyant, coléreux, vindicatif. Il ne soupçonne pas qu’il n’est qu’une branche, une feuille, un bouton ou une fleur de l’arbre principal ; quelle que soit sa clameur, sa parole n’est pas audible. Si tu es une feuille, tu chercheras à assimiler plus de sève ; si tu es une racine tu chercheras à envoyer plus d’aliments à l’arbre. « Je veux savoir ce que les gens pensent de moi. » Puisque tu es une partie de l’arbre, tu es serviteur de Dieu. Il n’est pas important que tu sois beau, il est important de connaître ta mission sur l’arbre. Ne regarde pas les feuilles tombées de l’arbre, ne les juge pas ; elles ne sont pas tombées d’elles-mêmes, mais sous l’impulsion d’une force extérieure qui les a arrachées à l’arbre. C’est en cela qu’elles vont donner leur tribut à César ; quelque temps après elles vont réapparaître sur l’arbre pour donner à Dieu ce qui est à Dieu. C’est ainsi que vous devez raisonner. Vous aurez alors aussi des souffrances et des épreuves, mais elles seront conscientes. Il existe deux types de souffrances : conscientes où l’homme sait pourquoi il souffre et tire profit de ces souffrances, ou bien inconscientes : l’homme crie, s’insurge et les amplifie encore plus. Par conséquent, seul est intelligent, religieux, érudit celui qui affronte ses souffrances et sait en tirer profit avec discernement.

         Par culture, au sens littéral du terme, j’entends l’application de la religion de tous les points de vue. Le véritable religieux est celui qui vit avec son âme et pas seulement avec sa raison et son cœur. La culture sous-entend la dilution de la religion, alors que la religion sous-entend la concentration de la culture. Quand je dis que l’homme doit être érudit, j’entends qu’il s’étende pour apprendre tous les rapports qui existent entre les êtres humains : apprendre les rouages de l’état, connaître les règlementations, les besoins de toutes les institutions et établissements ; voici la culture de César. Lorsque l’homme en arrivera aux rapports intérieurs profonds avec Dieu et la Nature pour distinguer ce qui est essentiel de ce qui ne l’est pas, alors il comprendra le Christ de façon juste et Le connaîtra. Le Christ a appris aux hommes comment manifester leur culture et comment appliquer intérieurement leur religion. César est la culture, et Dieu, la religion. Je dis : rendez à la culture ce qui est à elle et à la religion ce qui est à elle : il n’y a pas de religion sans culture.

         L’humain doit commencer par ce qui est visible et aller graduellement vers l’invisible. Ce que tu seras en tant qu’érudit, tu le seras aussi en tant que religieux : si tu es nerveux, menteur dans ta vie culturelle, c’est-à-dire ta vie avec les autres, tu le seras aussi dans ta vie religieuse. Mentir, c’est cacher la vérité. L’homme doit être pur, sincère car il est à tout instant face au visage de Dieu. Vous avez un convive, vous l’accueillez chez vous, vous fêtez sa présence, alors qu’il porte en lui les germes d’une maladie dangereuse qui va contaminer votre foyer ! Comment réagirez-vous ? Vous serez extrêmement mécontents de lui. Sachez que chaque visite à un proche, c’est comme paraître devant Dieu ; vous devez apparaître purs devant Dieu. Il y a des religieux qui portent le malheur du monde, le germe le plus dangereux. C’est peut-être inconscient, mais ils doivent en tenir compte et se purifier. Par conséquent, si tu es indisposé et irascible, ne visite pas ton ami. Visite ton ami uniquement lorsque Dieu est en toi. Voilà ce que le Christ a prêché aux humains.

         Que représente l’enseignement du Christ ? C’est un livre divin que chacun peut lire. Je relis ce livre chaque jour. Un tel dit qu’il a conversé avec le Christ ; c’est possible, mais seul celui qui s’est élevé très haut et s’est purifié, peut converser avec le Christ. Tu diras que tu es instruit, que tu as accès au Christ ; tu peux être instruit sur le milieu qui t’entoure mais non sur le Christ ; ton instruction ne t’ouvre pas l’accès au Christ. C’est l’humilité qui est nécessaire à l’être humain. Si tu es si savant, prédis combien d’années tu vivras, combien d’enfants tu auras, comment ils seront. « Je ne sais pas combien d’années je vivrai, ni le nombre d’enfants que j’aurai. » Tu ne sais pas les choses qui te concernent directement, mais tu te prononces sur des choses lointaines. Il faut s’instruire : il y a une instruction pour le cœur et une instruction pour la raison. Le cœur est à César et la raison est à Dieu ; on fait parfois l’inverse : la raison à César, le cœur à Dieu. Rendez donc à la raison ce qui est à elle et au cœur ce qui est à lui. N’empêchez pas les sources ni les rivières de couler ; arrangez leurs lits pour qu’elles coulent librement. N’asséchez pas vos rivières, n’abattez pas vos forêts. Il faut beaucoup parler à l’homme contemporain pour qu’il assimile les choses selon le degré de son développement.

         La conscience se manifeste dans trois directions : mécanique, physiologique et psychique. La conscience mécanique est soumise à des processus allant de l’extérieur vers l’intérieur. Ces processus se passent aussi dans la nature. Beaucoup de rivières se rejoignent en une seule pour former un grand fleuve boueux. Les processus de la conscience mécanique ne sont pas divins. Dans la conscience physiologique et psychique les processus se font de l’intérieur vers l’extérieur : pas besoin d’utiliser un seau pour prendre de l’eau, elle coule d’elle-même. Grâce à ce courant d’eau vers l’extérieur, la source se nettoie et les impuretés sortent à l’extérieur : le Christ travaille sur cette source et veut la faire couler en vous. Lorsque vous voyez cette impulsion du Christ, vous vous y opposez et vous bouchez la source. Et en fin de compte, vous vous contentez des petites rivières qui se répandent dans un grand fleuve boueux en disant : « Je suis assez grand ! » Oui, tu es grand mais boueux. Il vaut mieux être une source plus petite, mais pure plutôt qu’une grand torrent boueux. C’est le chemin qui mène au Royaume de Dieu.

         Faites votre choix librement et décidez par vous-mêmes si vous serez un grand torrent boueux ou une petite source très pure. De cette décision dépend votre bien-être. Ce qui revient à dire : rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu.

 

Sofia, 31 décembre 1916


[1] Alors il leur dit : " Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. " À ces mots, ils furent tout étonnés et le laissant, ils s'en allèrent. (Matthieu 22, 21-22)

[2] « De même, que votre lumière brille aux yeux des hommes, pour qu’en voyant vos bonnes actions, ils rendent gloire à votre Père qui est aux cieux. » (Matthieu 5, 16)

[3] « Il en va du royaume des cieux comme d’un roi qui fit un festin de noces pour son fils. Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités. Mais eux ne voulaient pas venir. Il envoya encore d'autres serviteurs chargés de dire aux invités : ‘Voilà que j'ai apprêté mon banquet ; mes taureaux et mes bêtes grasses sont égorgés, tout est prêt, venez aux noces.’ Mais eux, sans en tenir compte, s'en allèrent, l'un à son champ, l'autre à son commerce ; les autres, saisissant les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Le roi se mit en colère ; il envoya ses troupes, fit périr ces assassins et incendia leur ville. » (Matthieu 22, 2-7)

Link to comment
Share on other sites

 Share

×
×
  • Create New...