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I - La famille du Maitre - Vie de Constantin Deunovski


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I

La famille du Maître

 

 

VIE DE CONSTANTIN DEUNOVSKI

Au début du XIXe siècle vivait dans un petit village de la péninsule balkanique une famille nominée Deunovski. Ce village, dénommé Oustovo, est situé dans le massif du Rhodope. Cette famille, de condition modeste, était connue pour sa piété. Un garçon naquit en 1830, prénommé Constantin. Très vite, dès qu’il fut en âge, il montra un fort penchant pour la lecture des petits ouvrages religieux empruntés au prêtre ou au bedeau de l’église.

Le niveau d’alphabétisation était alors très faible, et le jeune Constantin fut vite en mesure de conseiller ou d’instruire ceux qui avaient affaire à lui. D’autant plus que le pays bulgare était alors soumis à la juridiction turque et que, de ce fait, de fréquents conflits naissaient entre les villageois et les autorités.

Le jeune Constantin grandit donc dans un climat particulier résultant de la situation tant politique que religieuse. Autrement dit, très tôt il se manifesta comme un patriote et un défenseur de la foi chrétienne. Il instruisait les gens sur le passé lointain de la patrie bulgare et enseignait l’oeuvre léguée par les apôtres initiateurs de la culture slave, les saints frères Cyrille et Méthode.

Il avait entendu parler des monastères de Svéta-Gora, au mont Athos, en Chalcidique (Grèce) et l’idée d’entrer dans les ordres lui était venue à l’esprit, mais cela semblait bien lointain, car son petit village lui faisait l’effet d’être à l’autre bout du monde.

Un peu plus tard, un oncle maternel du jeune Constantin vint visiter la famille. Yorgaki Zébilev, c’était son nom, fut impressionné par l’esprit ouvert de son neveu et par sa soif d’apprendre, et il lui offrit de venir avec lui à Varna où il résidait.

Constantin avait alors 17 ans en ce printemps de 1847. La perspective de ce voyage et de la découverte d’un monde plus vaste que la cellule patriarcale où il avait vécu jusqu’alors, l’admiration qu’il ressentait pour cet oncle patriote si instruit, tout cela lui permit de surmonter la peine qu’il éprouvait à quitter les siens et le village.

À Varna, la vie lui parut différente et il dû apprendre le métier de chaudronnier dans l’atelier de son oncle qui possédait aussi une boutique où étaient proposés divers ustensiles.

Grâce à son travail, Constantin était en relation avec une foule de gens dont l’aisance était souvent bien supérieure à celle des habitants de son village natal. II put constater que la vie pauvre et rude dans les villages donnait aux habitants une conscience plus aigüe de leur misère et de leur asservissement à l’occupant turc, alors que dans une ville comme Varna les conditions de vie plus faciles modifiaient considérablement les données de la servitude.

En fait, Constantin se sentait un peu comme un étranger dans un milieu très différent de celui de sa première jeunesse. Cependant, il se lia avec trois jeunes gens de modeste condition avec qui il se reconnut quelque affinité. Chaque dimanche ils allaient sur les collines dominant la ville. Ils étaient liés par une même pensée patriotique et un grand intérêt pour la lecture des livres écrits en slavon ; et lors de leurs rencontres ils lisaient ces livres et conversaient avec enthousiasme sur ce qu’ils pouvaient faire et comment avoir une existence utile pour le peuple et pour la religion.

Au printemps suivant, les quatre jeunes gens avaient décidé de se rendre au mont Athos où dans les monastères vivaient des moines issus des peuples alors sous le joug ottoman : Bulgares, Serbes et Roumains. Ces moines ayant consacré leur vie au service de Dieu, vivaient une vie de prière et n’avaient comme arme que cette prière ; mais c’est l’arme la plus puissante pour ceux qui en reconnaissent la force.

Enflammés à l’idée de ce milieu de piété et de ferveur, ils pensaient vivre une telle vie sans doute calme en apparence, mais intérieurement riche en expériences.

Constantin et ses amis partirent donc, et ils prirent la mer sur le bateau d’un marin grec. Leur voyage sur la mer Noire se fit sans encombre et ils arrivèrent en vue du Bosphore et de Constantinople, port où le marin traita quelques affaires. Puis ils repartirent sur la mer Égée vers la Chalcidique.

Cette partie du voyage fut moins calme, car une tempête les jeta à la côte. Ils s’en sortirent tous indemnes en remerciant la providence, mais le bateau était perdu. Ils étaient alors non loin d’un grand fleuve, la Strouma, et ils continuèrent par la route leur voyage vers Salonique.

Dans cette ville, ils se rendirent à l’église Saint-Dimitri pour remercier Dieu d’avoir échappé aux périls du voyage. Ils rencontrèrent à ce moment-là un vieux prêtre à qui ils firent part du but de leur voyage vers le mont Athos. À la fin de la conversation, le vieux prêtre demanda à Constantin de revenir le lendemain pour un entretien particulier. C’était le Samedi saint de 1854.

Lors de cet entretien, Constantin confirma que son désir était de devenir moine à Svéta-Gora, et il en donna les raisons. Le vieillard l’écoutait parler avec bonté, toutefois, à l’étonnement de Constantin, il lui conseilla avec autorité de revenir à l’endroit fixé par la Providence, et qui n’était pas le monastère. Le salut de son âme ne dépendait pas du lieu où il se trouvait, lui dit-il en substance, et, quels que soient la sincérité de sa pieuse pensée et son amour pour Dieu et le peuple, sa voie était tout autre.

Bouleversé, Constantin accepta ce message inspiré qui venait brusquement changer la direction de son chemin. La conversation dura longtemps ; le vénérable prêtre entretint Constantin des nombreuses épreuves vécues par les peuples soumis à l’occupation turque et il lui prédit que bientôt les peuples asservis retrouveraient leur liberté ainsi que leur Église.

En témoignage de confiance et comme gage de sa mission future, Constantin reçut du prêtre une toile de teinte claire qui, déroulée, montrait une icône peinte représentant la descente de croix ; un texte entourait cette image. Cette icône avait été réalisée après des massacres faits par l’occupant. Alors il y avait eu une apparition dans une église de Salonique. Trois hommes et une jeune fille apparurent à quelques personnes et prophétisèrent la ruine de l’Empire ottoman et la restauration de l’Église chrétienne orthodoxe.

Après cette rencontre qui fut pour lui un évènement considérable, Constantin se sépara de ses trois compagnons pour revenir à Constantinople par mer. C’est dans cette dernière ville qu’il rencontra quelques Bulgares, et notamment un homme qui eut par la suite une importance considérable sur le déroulement de son existence. Cet homme, Athanase Gueorguiev, eut de nombreuses conversations avec Constantin qui lui fit bien sûr le récit des péripéties de son voyage. Toujours est-il qu’en peu de temps Constantin s’aperçut qu’il avait rencontré un protecteur, car Athanase Gueorguiev lui offrit de le prendre avec lui pour travailler et poursuivre ses études. Il lui fit comprendre que son retour immédiat à Varna ou dans son village serait mal compris et qu’on le taxerait d’inconséquence.

Cet homme paraissait de bon conseil et Constantin fut attiré par cette forte personnalité qui dégageait une grande autorité. Il comprit rapidement qu’Athanase faisait figure de notable. Constantin vit dans 

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cette rencontre un nouveau signe providentiel étant donné les qualités de croyant et de patriote qu’il reconnaissait à cet homme.

Athanase Gueorguiev revint donc à son village de Hatardja quelques jours plus tard, accompagné de Constantin. Celui-ci se vit attribuer une chambre en haut de la maison. La famille lui plut et il constata vite que son protecteur était un inspirateur éminent du nationalisme bulgare dans sa région. Mais la plus forte impression qu’il ressentit fut produite par la jeune Dobra, une des jeunes filles de la maison.

Dans ce milieu typiquement patriarcal, Constantin se préparait à devenir maître d’école, tout en consacrant son temps libre à aider aux champs et aux étables de la ferme de Gueorguiev.

Dans le même temps fut conçu le projet d’édifier une église à Hatardja, et une souscription fut ouverte. Constantin, quant à lui, continuait à se perfectionner dans l’étude des saintes Écritures et de la langue bulgare.

Quatre années s’étaient écoulées depuis l’entretien de Salonique qui avait changé le cours de sa destinée, et 1858 fut marqué par trois évènements de nature différente, mais néanmoins possédant un lien évident, car tous étaient reliés au foyer de Gueorguiev. D’abord la modeste église put être consacrée. Puis la petite salle attenante à l’église fut inaugurée comme école. Enfin, le mariage de Dobra et de Constantin fut célébré.

Athanase Gueorguiev n’eut pas de meilleur adjoint que son gendre qui avait été ordonné pope* et était devenu maître d’école du village.

Plus tard, le pope Constantin Deunovski fut nommé officiant en l’église Saint-Athanase à Varna.

 

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