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1915_07_25 Les vieilles outres et les outres neuves


mayakitanova
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Les outres vieilles et neuves

 

Personne ne met du vin nouveau

dans de vieilles outres…

Mais le vin nouveau doit être mis

dans des outres neuves ;

et ainsi ils se conservent l'un et l'autre.[1]

(Luc 5 : 37-38)

 

            Cette courte parabole est classique dans la forme et dans le fond. Le Christ fait une synthèse d’idées : il dit que personne ne doit verser de vin nouveau dans de vieilles outres, car ces dernières vont éclater. Devons-nous prendre cela au sens propre ? Non, c’est vrai au sens figuré : c’est une analogie entre d’une part, le nouvel enseignement et le vin nouveau et d’autre part, les vieilles personnes et les vieilles outres. Le vieux vin qui a fini de fermenter peut rester dans une vieille outre, mais le vin nouveau qui doit encore fermenter, s’il est mis dans une vieille outre, la fera éclater. Cette parabole exprime une idée cachée, une grande loi : les idées divines, introduites dans ce monde nécessitent des outres neuves, plus souples, qui résistent à la fermentation, c’est-à-dire des hommes qui ont une raison et un cœur réceptifs envers la nouvelle vérité. Lorsque l’esprit est occupé par de vieilles idées, pensées, émotions, la nouveauté ne peut pas pénétrer en lui ; en d’autres termes, dans les formes anciennes il ne peut pas y avoir d’impulsion pour accomplir un exploit. De ce point de vue, les jeunes gens sont généreux alors que les vieillards de quatre-vingt-dix ans doivent être sollicités quatre-vingt-dix fois avant de donner un sou, car ils sont peureux, ils se sentent faibles et infirmes, privés de leurs forces et de leurs moyens, contrairement aux jeunes. C’est pourquoi le Christ dit que le vin nouveau se met dans les outres neuves.

 

            Lorsque le nouvel enseignement se déverse dans le monde, il fait réagir les vieux qui le considèrent comme néfaste et source de dégradation. Pourtant aucun père ne désire avoir un fils qui naisse avec de vieilles idées ; chacun rêve d’avoir une descendance aux idées modernes, réceptive aux idées du siècle.

 

            Le vin représente par lui-même une force ; pour donner une impulsion à l’évolution humaine, il faut de la force ; cette force n’est rien d’autre que l’esprit de l’homme au sens large : une force intelligente qui travaille et construit suivant les lois divines. Le dessein de Dieu est de faire que tout grandisse et se développe ; Dieu n’aime pas les vieilles outres, Il les met au fond des caves comme les vignerons ; le temps viendra pour trouver des gens qui boiront aussi de ce vieux vin. Lorsque vous acceptez le nouvel enseignement, vous vous trompez en pensant qu’il ne fermentera pas en vous et que vous resterez les mêmes, c’est impossible, c’est comme si un sculpteur pouvait travailler le marbre sans faire d’éclats. Beaucoup de morceaux seront projetés à droite et à gauche et les personnes âgées doivent se tenir à distance si elles ne veulent pas recevoir d’éclat sur la tête ; ce n’est pas la faute du sculpteur, mais celle des vieilles personnes qui ne s’écartent pas. « Je sculpte une statue pour les générations futures, dit-il, et chacun doit se protéger. » L’artiste peut travailler avec un pinceau, un archet, un marteau, cela dépend de sa manière de faire ; ce n’est pas important. Ce qui est important, c’est de travailler en accord avec l’ordre divin. Lorsque le travail déclenche des frictions, il ne faut pas s’écrier : « Nous sommes dépassés ! » Le calme perpétuel n’existe qu’au cimetière. Celui qui aspire à Dieu, qui veut avancer et grandir dans la vie divine, a besoin de travail et de combat. Cet élan représente le bien qui réside dans l’individu, dans la société, dans l’humanité. Ceux qui veulent se reposer et conserver l’ancienne compréhension de la vie, ne saisissent pas l’intensité des idées nouvelles exprimées dans la parabole du vin nouveau. Savez-vous le temps qu’il a fallu au pied de vigne pour amasser ce vin ? Savez-vous la force qu’il renferme ? Il est d’abord sucré, puis âpre, puis devient si puissant, que si vous en buvez trop vous perdez votre état normal.

 

            Ainsi, celui qui veut assimiler le nouvel enseignement doit se libérer des vieilles outres. Si vous n’avez pas d’outres neuves, tenez-vous à distance ; d’autres viendront, des gens nouveaux, et le nouvel enseignement sera déversé en eux. Vous aussi, vous pouvez le recevoir, mais il faut d’abord vous débarrasser des vieilles outres, vous libérer des vices et des penchants qui vous entravent dans l’assimilation du nouvel enseignement.

 

            Il y a en Inde des charmeurs de serpents célèbres : ils les domptent et les envoient en Europe. Pour cela, ils enferment les serpents  dans des paniers ; ils les attrapent, des plus petits aux plus grands et des plus inoffensifs aux plus dangereux, et ils les apprivoisent. Un soir malheureusement, ils n’ont pas fermé complètement un panier ; dans la nuit tous les serpents s’en sont échappés et sont venus s’enrouler autour du chasseur. Il se réveille le matin et, conscient de sa situation désespérée, il a la présence d’esprit de rester immobile. Son serviteur arrive, étonné de ne pas voir son maître se lever ; il ouvre la porte et le découvre, enlacé par des serpents de toutes sortes. Avisé, le serviteur prépare un très grand bol de lait bouillant et le pose au milieu de la pièce. Les serpents, attirés par le lait, se détachent de son maître pour aller boire. Le charmeur de serpent s’est dit : « Ce panier devra être mieux fermé la prochaine fois. » Vous aussi, vous  serez un jour dans la peau de ce charmeur de serpents et vous aurez alors besoin de sang-froid et de lait : ce lait symbolise la vie intelligente.

 

            Le Christ dit : « Ne mettez pas de vin nouveau dans une vieille outre car il vous troublera ». Si un religieux est troublé, c’est une vieille outre, incapable de supporter le vin nouveau, le nouvel enseignement. Deux idées contradictoires ne peuvent pas se concilier ; la loi de Moïse dit : « Dent pour dent, œil pour œil »[2], mais la loi de l’enseignement du Christ dit précisément le contraire : aimer nos ennemis ; si on nous frappe sur la joue droite, tendons aussi la gauche. Comment concilier ce nouvel enseignement avec l’ancien si on garde les deux ? La loi de Moïse est destinée aux vieilles outres, alors que l’enseignement du Christ exige une outre neuve. Selon la loi de Moïse, les vieilles personnes qui ne sont pas aptes à affronter le nouveau, veulent piéger l’adversaire et l’aveugler pour l’empêcher de les voir et de les atteindre, alors que l’enseignement du Christ dit : « Vous pouvez faire de vos adversaires vos amis, les désarmer et même les mettre à votre service. »

 

            Maintenant venons-en au sens psychologique, intérieur, des paroles du Christ : dans la vie, nous ne devons jamais penser que nous avons complètement compris la vérité et que nous n’avons plus rien à apprendre ; nous serions de vieilles outres, bloquées dans notre développement sur terre. « Nous sommes érudits ! –  En quoi réside ton érudition ? – Nous avons lu beaucoup d’écrivains. – Et alors ! » Il nous faut pénétrer dans cette philosophie qui peut redresser notre vie et nous apporter ce bonheur que nous recherchons. J’ai déjà expliqué une fois le mot bonheur – штастие– de quelles lettres est-il constitué ? La lettre ш – trois pointes vers le haut – représente la main de l’homme qui travaille ; la lettre т montre la directive ou la force qui suscite le travail ; ensuite vient le а : c’est le nez de l’homme ; il faut travailler, mais il faut aussi avoir un discernement pour savoir comment travailler. Si vous prenez la lettre c, vous aurez le cœur de l’homme et si vous la retournez vers le haut, elle représentera un bateau : ce qui sera gagné par le labeur, sera conservé ; la lettre и indique une descente et une ascension : du haut vers le bas puis du bas vers le haut ; ces deux directions côte à côte forment le diamètre du cercle, la roue qui entraîne la voiture en avant ; e montre le centre auquel vous devez toujours vous accrocher. Par conséquent, il vous faut des bras, un discernement, un cœur et un haut idéal.

 

            Je vais vous illustrer cela à travers une anecdote bulgare. Selon nos croyances, la fièvre est une créature vivante. Un berger s’était arrêté sur un pont et avait  entendu deux fièvres se parler entre elles ; l’une disait qu’elle irait rattraper ce berger-là juste à son retour dans la montagne ; à la question de la seconde pour savoir comment elle ferait pour l’attraper, elle a répondu : « J’entrerai par la première cuillère de lait qu’il boira au printemps. » Ayant compris qu’il était question de lui, le berger décida de prendre des précautions. Ce jour-là, une de ses brebis est morte et il l’a dépecée pour faire une outre de sa peau. Lorsqu’au printemps le jour prévu est arrivé, il a mis la première cuillérée de lait dans l’outre puis il l’a ficelée. Alors, la fièvre a fait gonfler l’outre et la secouait frénétiquement chaque jour à midi. À l’automne, le berger a ouvert l’outre et l’a laissée partir. Les deux consœurs se sont de nouveau rassemblées sous le pont et l’une d’elle a dit : « J’ai eu la mésaventure de me retrouver dans une outre vide ! »

 

            Vous aussi, vous ressembleriez à cette fièvre si vous vous serviez des vieilles outres et vous diriez en vous en échappant: « Nous avons appris à secouer les outres. » Ce sont les dogmatiques contemporains qui ne font que secouer des outres ! Ils disent : « On est à l’étroit ». Non, ils sont à l’aise, mais ils n’ont pas de quoi se nourrir. La croyance populaire que je viens de conter renferme toute une philosophie. Un nouveau destin doit diriger le monde. Il faut déposer dans nos enfants le vin nouveau car il est la force. Les mères qui veulent avoir de bons enfants doivent être bercées par les nouvelles idées ; si vous êtes immergées dans les anciennes idées, je ne vous conseille pas d’enfanter. Qu’allez-vous mettre au monde ? Des êtres inaptes à la vie comme il y en a des milliers. Les Saintes Écritures disent : «Croissez et multipliez ! », elles ne disent pas d’enfanter des avortons, mais des êtres à l’image et à la ressemblance de Dieu. C’est le nouvel Enseignement que le Christ prône et qui transformera le monde s’il est bien compris. La vigne et la sève sont en nous ; lorsqu’un jour notre vigne donnera du raisin, sa sève se mettra à fermenter : c’est une loi implacable dans le monde, et quiconque songe à vivre sans fermenter ne comprend pas la vie.

 

            Le Christ dit à un autre endroit : « Celui qui veut me suivre, qu’il porte sa croix »[3] ; le vin nouveau, c’est la croix. La croix est une force pour celui qui la comprend. Dans le monde, il y a plusieurs sortes de croix et les gens s’en plaignent, mais Paul dit à ce propos : « Je vais m’enorgueillir dans la croix du Christ. »[4] Vous vous lamentez de vos souffrances en proclamant qu’elles sont insoutenables, mais vous ressemblez à celui qui se plaignait du poids de sa croix. Voici ce qui lui est arrivé : le Seigneur a dit : « Enlevez-lui cette croix. » Puis Il l’a introduit dans une grande salle en disant : « Dans cette salle il y a de grandes et de petites croix, des croix en or, en argent, en pierre et en fer,  choisis-en une. » En cherchant, l’homme a trouvé une petite croix et a dit : « Voici, c’est cette petite croix que je veux. – Mais c’était celle-ci que tu portais jusqu’à maintenant. C’était elle la croix que je t’avais donnée » a dit le Seigneur. 

 

            Nous exagérons souvent nos souffrances et nous implorons l’amélioration de notre sort ; il est impossible de changer son destin, de nous débarrasser du poids que nous devons porter. Vous dites : « Quand mes affaires s’arrangeront, ma femme et moi, et même mes enfants, nous emprunterons le nouveau chemin et le vin nouveau pourra fermenter. » Si vous pensez d’abord régler vos affaires courantes et ensuite suivre le Seigneur, vous vous illusionnez. L’éducation est un processus qui se déroule en même temps pour tous : le père, la mère et les enfants : lorsque les parents s’éduqueront, les enfants en feront autant.

 

            Je vais illustrer cela par un autre exemple. On raconte que pendant les prêches du prédicateur américain Moody, un enfant a questionné son père : « Papa, pourquoi tu ne chantes pas ? – Je suis déjà confirmé dans la foi, c’est à vous de chanter maintenant ; c’est pour vous tout cela, nous les anciens, nous avons déjà écouté et écouté tant de fois » a-t-il répondu.

 

            Alors l’enfant s’est dit : « Très bien, j’ai un père qui a eu la confirmation. » Un jour, son père attèle un cabriolet et part à travers la campagne, mais peu avant un sommet le cheval s’arrête, ce qui fait dire à l’enfant : « Papa, le cheval a reçu la confirmation ! »

 

            Lorsque nous nous arrêtons, c’est que nous sommes « confirmés » : nous sommes une vieille outre dans laquelle le vin nouveau ne peut pas fermenter. Et nous croyons pourtant être prêts pour le Ciel, pour entrer au paradis, vivre une vie angélique, comprendre les vérités divines ! Comment les comprendre si nous vivons dans les caves des vieilles outres ? Ainsi le Christ vient-t-il nous dire : « Il faut des outres neuves. » Les vieillards sont de vieilles outres et les jeunes sont des outres neuves ; les vieilles personnes ne se sentent pas concernées, mais les jeunes leur disent : « Attendez qu’on verse en vous aussi le vin nouveau. » Les vieux ne doivent pas recevoir de vin nouveau ; ils ont achevé leur évolution. Le vin nouveau doit circuler dans les artères et les veines des hommes nouveaux. Il y a en nous une lutte, un combat, un déchirement, car le vin nouveau et le vin ancien s’affrontent. Le Christ veut dire : « Ne mettez pas le vin nouveau en vous si vous n’êtes pas prêts », et il prône : « Purifiez-vous d’abord ! » Chaque enseignement, chaque philosophie peut nous être utile si nous sommes purs. Une progression souple et un essor spirituel, c’est cela le nouvel enseignement.

 

            Si nous pouvions observer la conscience de l’homme ancien du point de vue occulte, nous verrions une bougie éclairant faiblement ; si nous regardions l’homme nouveau, nous verrions sa bougie briller avec éclat. On peut assimiler l’homme ancien à la terre éclairée par la lune, et l’homme nouveau, à la terre éclairée par le soleil. Un vin nouveau est nécessaire pour le développement spirituel : interrogeons-nous pour savoir si nous l’avons. Celui qui a bu le vieux vin et rien d’autre, dit : « Le vieux vin est meilleur », mais le vin, une fois fermenté, vieilli, ne peut plus évoluer davantage. Il ne peut qu’enivrer les gens, les égayer un peu, mais les faire travailler, progresser, jamais ! Si nous sommes malheureux, c’est parce que notre vie fermente, le vin tourne au vinaigre et n’est plus aussi sucré qu’avant.

 

            J’ai observé les Bulgares sortant de la messe et allant à la taverne pour boire ; ils se rassemblaient d’abord deux par deux : « Servez-nous un demi pichet de vieux vin : à votre santé ! » Ils vident un ou deux verres, puis se rassemblent à trois, puis quatre et continuent de boire ; les débats s’animent, toute la taverne prend part aux discussions ; puis du bruit se produit : on est en train de battre quelqu’un. Pourquoi ? Il n’a pas clôturé son champ. On le corrige dans la taverne pour l’obliger à clôturer son champ. Cela ne se passe pas ainsi uniquement dans les tavernes. Visitez une place boursière où se négocient les opérations commerciales : vous diriez que tous ces gens sont fous. C’est ainsi qu’une femme qui a visité une place boursière a dit à son mari : « Pourquoi m’as- tu amené dans cet endroit de fous ! À la bourse, je pensais être présentée à des gens nobles. » Lorsqu’on commence à départager, à diviser et à se disputer à la maison, c’est que le vin a commencé à fermenter : comme ils ne peuvent rien créer de neuf, ils veulent s’emparer du bien des autres ; de même une mère qui ne peut pas enfanter prend l’enfant des autres.

 

            Ainsi, le vin nouveau qui apportera la nouvelle vie et qui nous apprendra à vivre et travailler, à créer des rapports sains entre nous, nécessite des outres neuves ; voilà l’enseignement du Christ. On dit qu’il n’est pas applicable ! Si, il est applicable. Allez-y, arrêtez-vous ne serait-ce que cinq minutes par jour et méditez là-dessus ; prenez cette parabole, lisez-la, prenez cinq minutes tous les jours pour réfléchir sur le vin nouveau ; vous verrez quels résultats vous obtiendrez. Arrêtez-vous cinq minutes pour penser à Dieu, aux gens vertueux sur terre qui travaillent sans relâche, aux bonnes mères qui élèvent leurs enfants avec patience, aux bons pères qui prennent soin de leurs familles ; vous verrez le processus que ce vin nouveau produira. La femme dit : « Je me suis mariée, mais mon mari est un vaurien. » Qui vous a forcé à choisir une vieille outre ? Savez-vous qu’ainsi vous ressemblez à celui qui, au temps de l’occupation turque, a volé un âne et s’est justifié auprès du juge en disant : « J’étais en haut d’un poirier, je suis tombé droit sur l’âne qui m’a emporté avec lui ! » Dites-vous : « J’ai besoin de vin nouveau, dans les idées, dans le cœur, dans le monde. » On atteint soixante, quatre-vingts ans et on veut aller à la noce et avoir des enfants ; je comprends, il y a des exceptions comme Abraham qui a enfanté très âgé, mais il avait des idées nouvelles, il n’avait pas vieilli. De nos jours les hommes de quarante ans sont déjà vieux. « Que nos enfants aient la santé, nous, nous sommes finis ! » Tu es donc une vieille outre, il faut te mettre dans la cave ; tu es un oisif qui ne veut pas comprendre la volonté divine. Il faut dire : « Seigneur, je T’ai compris, je veux maintenant travailler pour Toi comme travaillerait un jeune homme. » À bas votre vieillesse, mettez vos vieilles outres de côté, jetez les loin : les gens avec de vieilles outres et du vieux vin ne sont pas pour le Royaume de Dieu ! Je ne veux pas qu’ils jettent leur vieux vin, mais je veux qu’ils mettent le vin nouveau dans des outres neuves. Lorsqu’ils comprendront cette pensée divine, elle les sublimera par sa puissance.

 

            On cherche comment éduquer les gens ; la méthode est très facile : lorsque la coque d’un navire en mer est percée, on bouche le trou, sinon le bateau coule. Vérifiez si votre bateau n’est pas percé, bouchez le trou le cas échéant et vous serez hors de danger. Un jour vous êtes mécontents : votre bateau est percé, l’outre est percée et rien de bon ne vous attend si vous ne bouchez pas le trou. Dans certaines situations l’homme doit obéir strictement, comme l’enfant de ce cheminot dont la maison était longée par la voie ferrée. Alors que le train express approchait, l’enfant en train de jouer a entendu un cri : « Couche-toi ! », ce qu’il a fait et ce qui lui a sauvé la vie. Parfois on vous dit : « Couche-toi ! – Mais pourquoi ? » Couche-toi, et ne demande pas pourquoi ; lorsque le train express sera passé, tu verras pourquoi. Face à certains dangers nous devons nous agenouiller, et une fois qu’ils se sont éloignés, remercier Dieu.

 

            Mais quelqu’un proteste : « Je ne veux pas m’adapter aux conditions, je ne veux pas être souple. » Tu dois t’adapter ! La pluie ne se soucie pas si tu es assez couvert ou non ; le soleil non plus ne prend pas en considération ta capacité à supporter sa lumière, c’est à toi de t’adapter à toutes les variations, et être prêt à les supporter. La pluie et le soleil font très bien leur travail : que le soleil brille, que la mer s’agite, que les vieilles outres se percent, cela ne doit pas vous déranger car le Seigneur a décidé de faire éclater les vieilles outres et de verser du vin nouveau dans des outres neuves. Si les gens aux vieilles idées et pensées pensent pouvoir vivre dans des conditions nouvelles, ils se trompent terriblement ; c’est le destin, c’est la loi divine, le Seigneur vous veut rajeunis, ressuscités. « Comment ressusciter ? », demandent certains ; une forme nouvelle apparaîtra dans laquelle déposer votre vie : une forme réelle, pas une forme rêvée. Si vous compreniez la loi que vous suivez à présent, vous pourriez vous rajeunir. Comment cela ? En apprenant la loi, vous allez rénover intérieurement votre âme.

 

            Lorsque nous parlons de résurrection, j’entends ces formes avec lesquelles le Seigneur travaille en nous. Il faut préparer les outres neuves, alors le Seigneur dira : « Apportez-les pour mettre en eux du vin nouveau. » Certains demandent : « Comment agit le Seigneur maintenant dans le monde ? » Il prépare des outres neuves, il crée du vin nouveau, et c’est pourquoi le Christ dit : « Mon Père travaille jusqu’à maintenant et Je travaille aussi pour vous. »[5] Et nous devons être prêts à ne pas détériorer ces outres, car il est très facile d’altérer la raison et le cœur de l’homme, mais il est très difficile de les réparer. Que le Seigneur voie que vous vous êtes mis au travail ! Vous vous demandez pourquoi la vie est ainsi ? Je vois dans les yeux de certains parmi vous qu’ils ont bu trop de vieux vin : ils doivent se dégriser ; la joie doit remplir vos cœurs car ce monde est créé pour vous, avec toutes les conditions pour votre développement. « Mais c’est la guerre, l’affliction. » ничего[6], comme disent les russes. « Mais le monde est en déperdition. » ничего, rien ne se perd ! Des milliers de maisons seront détruites, comme de vieilles outres, mais de nouvelles seront construites. Maintenant le Seigneur verse le vin nouveau dans des outres neuves. Seuls les gens enivrés guerroient ; hommes ou femmes se battent seulement s’ils sont enivrés. Le vin nouveau est synonyme de musique, de chansons, de fraternité entre les gens : c’est l’enseignement du Christ. Lisez l’Évangile et pénétrez-vous de cet enseignement, pensez cinq minutes par jour à la vie éternelle, à Dieu, aux gens vertueux, pensez à quelque chose de noble qui vous élèvera. Alors vous comprendrez les choses plus profondément. Oh ! Que de choses vous avez encore à apprendre, mais vous devez déjà vous préparer à cette nouvelle compréhension. Comment sera la vie future ? Merveilleuse, telle que vous ne l’avez pas rêvée, songée, entendue. Comment l’homme peut-il voir les beautés du monde s’il dort ? Vos âmes endormies doivent s’éveiller ; vous devez sortir le bol avec le lait pour faire rentrer toutes les perfidies, comme les serpents dans le panier. Soyez porteur du vin nouveau, du nouvel enseignement, prônez la joie, la gaîté dans le monde. Et lorsque vous souffrez, dites que vous souffrez parce que vous n’accomplissez pas la loi divine.

 

            Nous disons souvent que les conditions créent la vie, mais l’homme aussi crée les conditions. Je vous ai déjà raconté l’histoire du lord anglais, parti en voyage avec sa fille et son serviteur et le naufrage qui a suivi. Ainsi, dans la vie, vous pouvez être maître et serviteur : si vous avez la connaissance pour appliquer les lois divines, vous êtes maître ; si vous ne savez pas les appliquer, vous êtes serviteur. Celui qui veut commander, doit se pénétrer de ce nouvel enseignement : il apporte la compréhension de la vie. Ce lord, s’il ne s’était pas retrouvé sur l’île déserte, n’aurait pas su comment cultiver la vie ; c’est là qu’il a appris cet art. Dans la vie nous pouvons vivre une mésaventure, quelqu’un peut nous commander ; apprenons à le servir et le Seigneur nous fera sortir de l’île déserte. Remerciez la providence d’être tombés sur cette île pour apprendre à cultiver le blé, c’est-à-dire la vie. Jusqu’à maintenant vous n’avez pas appris à cultiver votre raison et votre cœur, ce qui suscite la faim et le mécontentement en vous. Vous mangez quatre, cinq fois par jour, vous grossissez et vous vous lamentez : cet engraissement touche aussi votre discernement. Cette graisse doit être transformée en énergie. Vous avez remarqué que les gens qui font un travail mental intense et œuvrent sur le plan spirituel, n’engraissent jamais. Si vous avez accumulé de la graisse, mettez-la dans le moteur de la vie spirituelle et avancez vers la réalisation de vos rêves les plus nobles : c’est là votre salut.

 

Sofia, 25 juillet 1915

 

_________________________

[1] Personne ne met du vin nouveau dans de vieilles outres ; sinon le vin nouveau fera éclater les outres et le vin se répandra, et les outres seront perdues. Mais il faut mettre le vin nouveau dans des outres neuves. (Lc 5, 37-38)

[2] Tu ne t’attendriras pas : vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied. (Deutéronome 19, 21)

[3] Puis il dit à tous : Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même et prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive. (Luc 9, 23)

[4] Pour moi, non, jamais d’autre fierté que la croix de Notre Seigneur Jésus-Christ... (Galates 6, 14a)

[5] Mais Jésus leur répondit : "Mon Père jusqu'à présent est à l’œuvre, et moi aussi je suis à l’œuvre. (Jean 5, 17) (Le jour du sabbat)

[6] « Cela ne fait rien »

 

Traduit par Bojidar Borissov

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