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1916_09_17 La charité


mayakitanova
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La miséricorde

 

Un après-midi, vers trois heures, il eut une vision :

 il vit distinctement un ange de Dieu entrer chez lui

et lui dire : « Corneille ! » Il regarda l’ange

avec frayeur et lui dit : « Qu’y a-t-il, Seigneur ? »

L’ange lui répondit : « Dieu a prêté attention à

tes prières et à l’aide que tu as apportée aux pauvres,

et il ne t’oublie pas.

Les actes des Apôtres 10, 3-4

 

            Vous les érudits aux idées avancées, à l’esprit critique, vivant au XXème siècle et prétendant maîtriser les forces de la nature, vous pourriez vous interroger sur le lien qui existe entre Corneille et son songe ! Il faut toujours garder à l’esprit que nos théories et notre vision de la vie ne sont pas représentatives du monde réel, tel qu’il est ; ce ne sont que des considérations subjectives. Ce que le monde est réellement constitue une énigme que nous aurons du mal à percer, même si nous vivions des millions d’années sur terre.

 

            Le verset cité se rapporte à l’individualité. Sur terre, l’homme, dans sa phase de développement actuel a trois missions : envers lui-même, envers ses proches et envers Dieu. Lorsque nous parlons de l’homme, nous devons le situer soit dans sa vie individuelle, soit dans sa vie de partage avec ses proches, soit dans la vie qui se manifeste lorsqu’il est uni à Dieu. Parce que chacun de ces trois points de vue offre une vision différente.

 

            Si nous cherchions à comprendre le point de vue de la science moderne sur la vie, nous verrions la chose suivante : la vie personnelle ou individuelle ne peut pas se prolonger après la mort ; la vie est hébergée par le corps et n’est que sa production ; la pensée est une production du cerveau et par conséquent la destruction du corps entraîne la disparition de la vie et de la pensée. Voilà ce que stipule la science officielle d’aujourd’hui, voilà sa vision des choses. D’après elle, la pensée est un produit du cerveau, mais, d’un point de vue purement philosophique, certains organes ne sont pas destinés à produire de l’énergie. Si la vie provenait des cellules du corps et si la pensée était réellement une production du cerveau comme l’affirme la science, alors ses conclusions seraient exactes. Mais nous possédons trois types d’organes avec trois types de fonctions : des organes qui produisent l’énergie, des organes qui libèrent l’énergie et des organes qui transmettent l’énergie. Prenons un projectile dans un canon moderne et le petit choc qui enflamme la substance explosive, et je vous demande : « Est-ce le canon qui crée une énergie ? Non, il ne fait que laisser passer et canaliser cette énergie. » Le canon ne crée pas l’explosif, son rôle se limite à la libération de cette énergie qui, par un changement des molécules, dilate leur volume et déclenche ainsi l’explosion. Il y a d’autres organes qui transmettent l’énergie. Imaginons un prisme qui, exposé aux rayons du soleil, réfracte la lumière et projette des couleurs : «  Est-ce le prisme qui crée ces couleurs ? Non, il ne fait que réfracter les rayons, et même si le prisme se brise, les couleurs existeront toujours. » Ainsi, l’énergie de la pensée humaine existe toujours même après la disparition du cerveau. En ce sens nous pouvons affirmer que le cerveau est un outil grâce auquel la pensée divine, l’énergie divine primordiale se réfracte et se manifeste en tant que conscience et pensée. Par conséquent, le cerveau ne fabrique pas les pensées, il n’est que l’organe de transmission de la pensée et la pensée divine continue d’exister après la désagrégation de cet organe.

 

            Nous nous trouvons donc dans un monde divin où certains organes ne s’altèrent jamais. Nous savons que dans le champ physique il y a certaines combinaisons qui subissent des changements, mais dans les sphères supérieures ou bien dans les états supérieurs primordiaux de la matière, il y a des combinaisons qui ne changent pas. Je les appelle des combinaisons stables, des archétypes dont notre monde contemporain tire son origine. Sa manifestation apparente est appelée monde physique, c’est-à-dire que ne réside pas en lui ce niveau de conscience élevée qui se trouve dans le monde spirituel. Par exemple, vos doigts n’ont pas la même sensibilité que votre cerveau ou bien vos oreilles n’ont pas la sensibilité qu’ont vos yeux pour distinguer la lumière. A quoi est due cette sensibilité des yeux ? Bien entendu, il y a diverses réponses à cette question, mais il faut toujours démarrer sa réflexion par une première affirmation. Il y a un axiome en mathématique qui énonce ceci : deux segments, égaux à un troisième, sont aussi égaux entre eux ; en d’autres termes il faut toujours commencer par un étalon, une unité de mesure, un point de départ. Cette sensibilité, ce point de départ dépend de l’âme humaine.

 

            Je n’ai pas le temps maintenant de vous dire ce qu’est l’âme. L’âme humaine est quelque chose de vaste, elle se manifeste individuellement en l’homme, mais aussi collectivement. En réalité l’âme est une, la vie est une, mais les gens qui comprennent mal cette idée philosophique ne voient pas ce que je désigne en parlant d’âme ou de multitude d’âmes. Prenons l’exemple d’un gland : le gland est un, mais lorsque nous le plantons, il forme d’abord une tige avec trois branches, puis encore trois se forment au-dessus, et ainsi de suite jusqu’à produire des milliers de feuilles et de glands individuels. Celui qui ignore la nature du gland et qui regarde l’arbre, considérera les feuilles comme des individus distincts ; or, tous proviennent du gland, cette première graine. Cette graine, c’est Dieu. Créez les conditions et semez cette graine en vous, et Il vous révélera tous les dons, tous les secrets et toutes les merveilles. Cette graine peut s’amoindrir ou grandir et se transformer en hêtre, en ours, en baleine, en homme, en ange. Cette semence est en nous-mêmes, elle est une et plusieurs en même temps. Ainsi, les choses peuvent s’unir ou s’éparpiller, cela dépend du point de vue : si nous regardons d’en haut, les choses sont multiples, mais lorsque nous atteindrons les racines nous verrons que tout est fixé à elle. C’est ainsi que nous devons considérer l’ensemble des créatures : certaines sont semblables à des feuilles, d’autres à des branches, à des racines, à des graines, à des fruits encore verts. Bien entendu, vous qui appartenez aux feuilles, vous ne pouvez pas saisir ma philosophie, car votre vie est courte : une vie qui dure six mois ! Au printemps, vous êtes beaux, splendides, mais à l’automne, aux premiers frimas, vous vous fanez et vous dites : « C’en est fini de nous. » Un jour, l’orage va faire plier les branches de votre arbre et finira par le terrasser complètement. Mais, même là, sur le sol, il restera un gland, porteur de la vie, qui proclamera : « J’ai la force de vous ressusciter ! » Il tombera alors par terre, se nourrira de sa sève et fera ressusciter tout le monde. Où est alors la fin des choses ? Ce processus est permanent, inscrit dans l’éternité. Lorsque les feuilles tombent sur le sol, ne pensez pas que la fin du monde est arrivée. Ne raisonnez pas comme Nastradin Hodja[1] qui disait : « Si ma femme meurt, la moitié du monde périt et si je meurs à mon tour, le monde entier meurt. » Ce monde ci peut périr, mais l’autre, le monde divin, absolument pas. Pourquoi mourons – nous ? Pourquoi notre monde n’est-il pas parfait ? Parce qu’arrivés à un stade, nous devons reformer un autre corps pour donner un nouvel élan de travail à notre âme.

 

            Corneille n’était pas un simple d’esprit ; selon moi il devait être initié et très érudit, car le Seigneur ne se manifeste pas aux imbéciles. Il serait incongru de voir un grand musicien jouer devant un sourd et lui demander ce qu’il a retenu ; le sourd répondra : « Je vois seulement que tu fais bouger tes doigts en avant et en arrière. » Le musicien lui dira : « Tu es bête ! » Mais en réalité, les deux sont bêtes. Ou bien imaginez un peintre qui a dessiné une belle toile et la montre à un aveugle en l’interrogeant: « Comment la trouves-tu ? » L’aveugle répondra : « J’ai une toile devant moi, avec quelques aspérités à certains endroits, tu l’as achetée quelque part ? » Le peintre lui dira : « Tu es un ignorant, tu ne comprends rien ! » Tous les deux sont ignorants : la premier, parce qu’il ne voit pas, et le peintre, parce qu’il ne perçoit pas que cet homme n’est pas en mesure de le comprendre. De la même façon, lorsqu’un être supérieur vient auprès de nous, nous devons comprendre le sens intrinsèque des choses. J’ai lu beaucoup d’ouvrages philosophiques, je les feuillette chaque jour et parfois je ris aux larmes : certains philosophes ressemblent à l’aveugle, ils travaillent en palpant des doigts et écrivent : « Ce monde est une toile, parsemée d’aspérités, de quelques souffrances, et tous les hommes sont des imbéciles. » Je leur dis : « Vous avez raison, mais ces conclusions  vous appartiennent. Le monde est plus qu’une toile, plus que des aspérités et des creux ; il faut de la lumière dans les yeux, les oreilles, le cerveau, dans tous les centres cérébraux de l’homme, éclairer ses aptitudes et ses forces, pour l’aider à comprendre les choses. » Pour comprendre le monde, il faut avoir vécu longtemps, une vie ne suffit pas. Que pouvez-vous saisir durant une vie de vingt, trente, cinquante, cent ans ? Dans les conditions actuelles, quelle philosophie apprendrez-vous ? Vous passerez votre temps à lire dans les journaux quelle armée est en train de vaincre, combien de soldats ont neutralisé les Roumains, combien de captifs ont fait les Bulgares, quelles inventions militaires ont fait les Allemands[2]. Par exemple les Allemands ont fabriqué des canons de 42 centimètres, les Français, des canons de 52 centimètres, les Américains, des canons de 54 centimètres ; les Allemands ont telle flotte de zeppelins, les Français, tant d’aéronefs ; je me demande quelle philosophie vous tirerez de tout cela.

 

            Il existe des lois qui régulent les choses. Les guerres qui éclatent ont des causes précises. Pour quelle raison un orage éclate-t-il et des nuages de poussières s’élèvent-ils dans les airs ? Les scientifiques expliquent que l’air s’est réchauffé plus ici, et un peu moins là, ce qui a créé un courant d’air. Pourquoi l’air doit-il se réchauffer et se refroidir, ne peut-on pas vivre sans cela ? Non, on ne le peut pas. Vous direz que c’est un mal, car parfois les tempêtes détruisent des maisons. Oui, mais en même temps elles apportent l’humidité, purifient l’air et sont plus bénéfiques que nocives pour le royaume végétal. À quoi est due une guerre ? C’est un orage dans le monde spirituel qui doit rafraichir les gens. Après cet orage, les peuples vont réfléchir, des écrivains feront leur apparition, tous se mettront à penser avec justesse. Maintenant nous ne voyons que le mal, mais en revenant dans cinquante ans nous en observerons les effets. Dans le monde divin, tous les moyens sont utiles, rien ne se fait au hasard. Celui qui est tué sur le champ de bataille, devait être tué ; celui dont la maison est brûlée, devait avoir la maison brûlée ; celui qui a eu la jambe amputée, devait se la faire amputer. Les statistiques démontrent la grande régularité des phénomènes ; il y a des lois qui régissent ces phénomènes dans la vie et qui nous semblent être le fruit du hasard : par exemple le nombre de bateaux qui doivent sombrer ou être construits en dix ans, la période du plus grand nombre de naufrages et la période suivante avec le plus petit nombre de naufrages ; ou bien prenons le cas des incendies : combien de maisons sont incendiées chaque année ; puis prenons les naissances et les décès : combien de personnes par an doivent naître et mourir. J’ai lu par exemple l’essai d’un mathématicien, qui est aussi astrologue : il a fait les calculs suivants : dans dix villes anglaises, il a étudié le nombre de filles et de garçons nés en dix ans, et il en a déduit la formule mathématique de calcul du nombre de garçons et de filles à naître dans les dix ans à venir, avec une précision de quatre-vingt-dix-neuf pour cent. Certains arrivent à faire des calculs encore plus avancés pour deviner par exemple les numéros qui sortiront au loto dont il y a quatre tirages annuels. Il y a donc une loi qui régule les choses. C’est une nouvelle science qui repose sur des bases profondes et réfléchies.

 

            Maintenant, vous vous grattez la tête et ce geste semble n’avoir aucun sens particulier, mais je sais pourquoi il se produit. Ou bien la personne s’est empêtrée dans ses affaires et pose son index sur son front au-dessus des sourcils ; elle se dit par-là : « Tu n’as pas bien calculé et c’est pour cela que tu t’es trompé ! » Il faut donc être attentif dans ses calculs. Dans ce laboratoire, situé au-dessus des sourcils, il est stocké tout ce dont vous avez besoin ; là est votre bibliothèque, c’est là où vous trouverez tel livre ou tel article de loi pour vous éclairer. Certains ont l’habitude de se prendre la tête entre les mains, mais ce geste n’ouvre pas les portes, il ne sert qu’à casser des noix. L’homme doit avoir la clé pour ouvrir la porte de la connaissance.

 

            Ainsi, nous devons vivre raisonnablement. Beaucoup de livres ont été écrits sur ce qu’est la vie raisonnable. C’est votre travail : vivre selon votre compréhension des choses, car un disciple qui n’a pas sa propre conception du monde, ne comprendra jamais ce que le maître lui enseigne.

 

            Nous nous trouvons à présent dans la contradiction suivante : une légende dit que le Seigneur a d’abord créé deux personnes sur terre, mais elles n’ont pas réussi à s’entendre et se sont tellement détestées qu’Il les a placées aux deux endroits les plus éloignés de l’espace pour qu’elles ne se croisent pas. Mais elles se sont ennuyé l’une de l’autre, elles ont éprouvé de l’amour et, pour s’unir, ces deux âmes ont fini par faire un pont pour se rejoindre, et ce pont, c’est la voie lactée. Il y a donc un chemin qui mène à l’entente entre les créatures : c’est la voie lactée de l’harmonie, de l’amour. C’est aussi par ce chemin que le Christ est descendu.

 

            Certains demandent ce qu’est un ange, moi je demande ce qu’est un homme. Les anciens Hindous ont défini l’homme comme une créature pensante ; et qu’est-ce que l’ange ? Ange en sanscrit signifie serviteur, mais également feu brûlant et aussi amour. Si tu aimes, tu es un ange ; si tu n’aimes pas, tu es un homme. Mais je dis à certains : « Tu n’es pas un ange, mais l’une de ces âmes qui ne s’est pas entendu avec son prochain et c’est pourquoi le Seigneur vous a enchaînés quelque part dans l’espace sans pont pour vous rejoindre. »

 

            Petar[3] en sanscrit signifie esprit (Pitar). En réalité, on a dit à Corneille : « Va auprès de l’Esprit, Il te révélera tout. » Petar signifie pierre en grec ancien. Il y a des pierres vivantes et seul l’Esprit peut être une pierre vivante. Par le mot pierre, le Christ désigne ce qui en l’homme est inaltérable, divin, intelligent.

 

            Corneille devait prier : voilà une tâche ! Beaucoup ne savent pas encore prier. Certains demandent : « Qu’est-ce que je dois dire au Seigneur, Lui-même, ne le sait-Il pas déjà ? » D’autres demandent comment ils doivent prier. Si vous interrogez un théosophe, il vous dira : « Je suis Dieu, je n’ai personne d’autre à prier, mais j’ai à réfléchir par moi-même », alors que le philosophe dira : « Je vais méditer. » Cependant, la prière est nécessaire, c’est la respiration de l’âme humaine, c’est la communion entre Dieu et l’âme humaine. Lorsque Dieu parlera, tu te tairas et tu écouteras comme un disciple ; et lorsqu’Il s’arrêtera, Il te dira : « Je veux que tu répètes ce que Je t’ai dit. » Le mot prière signifie monter et descendre. Certains parlent sans arrêt, ce sont des commères ! Même la nuit en dormant, ils bavardent alors qu’ils devraient se taire. Qu’est-ce que le sommeil ? Je vous le dirai : lorsque vous dormez, le Seigneur vous instruit : puisque vous êtes isolés du monde environnant, de vos proches, de vos maisons, alors le Seigneur peut vous enseigner. Lorsqu’on se réveillera, le Seigneur dira : « Répète ce que Je t’ai dit. » Que peut-on répéter si on n’a pas bien entendu et compris les prescriptions divines ? On battra sa femme, on corrigera les enfants et on sera indisposé toute la journée, parce qu’on n’aura pas appris la leçon, pas compris le sens de la vie pour ce jour-ci.

 

            Lorsqu’un messager divin vient du Ciel auprès de nous, il veut nous dire que sans pureté nous ne verrons jamais Dieu, sans sainteté nous ne Le comprendrons pas, sans bonté, sans amour, sans miséricorde et sans justice nous ne Le ressentirons pas. Nous devons comprendre ce qu’est l’amour. Certains disent : « Nous comprenons l’amour. » Parmi vous certains le comprennent, je le crois, mais vous devez le comprendre davantage. L’amour entraîne toujours la haine dans son sillage : si tu aimes le bien, tu hais le mal ; si tu aimes le mal, tu hais le bien. Par conséquent l’amour seul ne peut pas résoudre la question et délivrer les gens, s’il n’est pas accompagné d’un évitement permanent de son contraire. Alors, qui sauvera le monde ? L’ange de l’amour, accompagné de l’ange de la miséricorde. Seule la miséricorde n’a pas d’ombre, seule la miséricorde divine n’a pas de duplicité : nous devons apprendre la loi de la miséricorde. Voilà pourquoi l’ange est venu chez Corneille : pour lui apprendre la loi de la miséricorde. Lorsque les hommes dans le monde apprendront la loi de la miséricorde et l’appliqueront partout, alors ils trouveront tous la paix. La vérité rend l’homme libre, lui apprend à discerner ce qui est bien et ce qui est mal, celui qui est ignorant et celui qui est sage, mais elle n’a rien pour apaiser les gens ; l’amour seul ne peut pas non plus apaiser les choses. La miséricorde divine est la clé qui concilie la justice avec l’injustice, la sagesse avec l’ignorance, le bien avec le mal, pour qu’ils ne se bagarrent pas en vous. On dit de quelqu’un : « Il est bon, je ne le supporte pas ; il est bête, je ne le supporte pas ; il est mauvais, je ne le supporte pas. » Le monde n’est pas mauvais, c’est notre compréhension des choses qui est mauvaise ; nous sommes mauvais en nous-même, alors que le monde est très bien. L’âme que vous haïssez se tourmente, souffre, enchaînée quelque part au Ciel.

 

            Maintenant, certains pensent : « Tu ne te sauveras jamais et tu resteras éternellement en enfer. » Moi, je demande lequel de ces philosophes est proche conseiller du Seigneur pour savoir ce qu’Il pense. Ils sont comme le sourd qui écoute le grand musicien et comme l’aveugle qui effleure la toile du célèbre peintre. Est-ce que ce sont eux qui nous montreront la voie de la délivrance, la voie de la nouvelle civilisation ? Non ! C’est cet ange qui est descendu pour nous apprendre la miséricorde : le Christ ; dans l’âme du Christ il y a de la miséricorde et de l’abnégation. Parfois vous dites : « Nous sommes initiés, c’est pourquoi nous nous cacherons pour ne pas être pillés et démagnétisés. » Au contraire, ouvrez vos tiroirs- caisses, vos cœurs, ouvrez tout ! Ne vous recroquevillez pas comme l’escargot qui montre ses antennes et les cache ensuite ; quittez vos coquilles ! Je ne m’adresse pas à des escargots ou à des huîtres, je m’adresse à des gens qui s’interrogent : « Quel est le sens de ma vie, quelle est ma prédestination, qu’est-ce que je dois faire ? » Je leur réponds : « Vous devez apprendre la miséricorde divine. » Combien de fois j’ai parlé de la miséricorde et combien de fois on s’est mis en colère face à moi, en me disant : « Tu nous veux du mal, tu ne nous comprends pas ! » Je vous comprends, je comprends que vous aimez la vérité, la justice, mais je n’ai pas encore rencontré un homme miséricordieux, alors que la délivrance se trouve dans la miséricorde. C’est cela l’enseignement du Christ, c’est cela la nouvelle culture.

 

            La miséricorde viendra après cette guerre. Les infirmes qui se compteront par millions créeront un nouveau courant avec leurs idées ; ils s’interrogeront : « À quoi bon cette guerre si ce n’est pour corriger les anciennes erreurs ? » Les peuples en guerre aujourd’hui ne sont pas des barbares, mais ils sont instruits et ils méditeront sur cette question. Ils sont simplement irascibles comme le sont les hommes et les femmes. La femme ne supporte plus son mari, parce qu’il ose regarder les autres femmes : « Comment ose-t-il ? » Il devrait alors être aveugle pour ne pas les regarder ! L’homme de son côté se dispute aussi avec sa femme si elle regarde un autre homme.

 

            Certains prétendent que le Christ viendra pour arranger le monde. Le Christ vient en ce moment, comme il est venu chez Corneille, pour implanter le nouvel enseignement de paix entre les gens, l’enseignement de la miséricorde envers tous sans exception. Et lorsque nous commencerons à prier et à faire le bien, alors le Seigneur nous enverra chez ce Pierre, chez l’Esprit. Et l’Esprit nous apportera joie et gaîté, Il nous révélera les grandes tâches à accomplir. L’Esprit tracera la voie lactée dans notre âme et nous voyagerons de soleil en soleil, de planète en planète et nous contemplerons la grandeur du Seigneur. Nous irons d’abord sur l’étoile la plus proche, puis après avoir vécu là, nous irons sur d’autres étoiles. Pour vous tous il y aura des bienfaits grandioses, un futur grandiose, à condition d’embrasser la miséricorde. Qu’attendez-vous ? Que le Christ vienne vous délivrer ? Je sais que le Christ vous a sauvé au moins cent fois par le passé : combien de fois vous êtes-vous jetés à l’eau, et le Christ vous a toujours délivrés.

 

            Ce qui se produit actuellement dans le monde est très clair : c’est la main divine qui travaille, le Seigneur modèle un monde nouveau. Que deviendra la Bulgarie ? La situation de la Bulgarie, comme la situation de tous les peuples d’Europe sera largement meilleure qu’avant. Lorsqu’un homme épais et ventru, qui pèse cent cinquante kilos, attrape le typhus et mincit jusqu’à ne peser que cinquante kilos, on dit : « Pauvre homme ! » Pourtant, ce n’est que maintenant qu’il est réellement devenu un homme, ce qu’il n’était pas avant. Cette guerre nous soigne d’une maladie identique : tous les peuples sont malades et le Seigneur les guérit. Ceux qui meurent maintenant ressusciteront de nouveau, comme les feuilles qui tombent et qu’une nouvelle graine ressuscitera et appellera à la vie. Rien ne se perd dans le monde, la forme extérieure n’est pas le moteur de la vie intérieure : tout comme le Seigneur vit, nous aussi nous vivrons avec Lui. Et dans ce monde, nous devons tâcher d’être de bons serviteurs, de bons fils, des travailleurs honnêtes pour que, une fois revenus à Ses côtés, Il puisse nous dire que nous avons accompli Sa volonté.

 

            Maintenant, certains disent : « Je ne verrai pas le Seigneur ! » Chacun Le verra. Lorsque nous irons vers Lui, Il nous dira : « Pourquoi t’es- tu avili, pourquoi as-tu assassiné ton frère et déshonoré ta sœur ? Retourne de nouveau sur la terre. » Le Seigneur ne vous parlera pas sur un ton tranchant. J’imagine bien ce qu’Il vous dira : Il vous regardera avec gravité et dira doucement : « Je regrette beaucoup, mon fils, que tu n’aies pas encore du tout compris Ma miséricorde. Maintenant, retourne de nouveau sur terre pour apprendre la miséricorde, retourne pour montrer aux hommes celui que Je suis : Je suis le Dieu de la miséricorde. Les hommes Me croient cruel et insensible, ils se plaignent de Moi, ils me dévalorisent, ce qui n’est pas bien. » Et lorsque les hommes verront une personne miséricordieuse, ils diront : « En voici un qui s’approche de Dieu. » Alors qu’ils disent maintenant: « Les religieux aussi se querellent entre eux !  » C’est pourquoi je ne te demande pas si tu es pieux, mais si tu es miséricordieux. On peut qualifier quelqu’un d’instruit, mais il manque de miséricorde ; il se montre intelligent, mais il dit à son prochain : « Tu es bête, je ne te supporte pas. » Pour un autre on dira qu’il est bon, qu’il aime, mais qu’il manque lui aussi de miséricorde !

 

            Je veux que vous reteniez un seul mot ce matin : miséricorde.

 

            En 1875, à Chicago, pendant qu’un citadin était en train de traire sa vache à la lumière d’une bougie, l’animal a rué et la flamme s’est propagée dans la paille, et une grande partie de la ville a entièrement brûlé. Les pertes se sont élevées à des milliards de dollars. Lorsque l’incendie a encerclé sa maison, un homme riche a dit à un passant : « Je te donnerai deux cent mille dollars si tu sors mon coffre du feu. – Va au diable ! » lui a crié l’autre, courant pour sauver sa peau. Ainsi, le riche américain a dû fuir sans sa fortune. Maintenant quelqu’un dira : « Si j’avais été là, j’aurais pris ces deux cent mille dollars, quelle aubaine c’était ! » Oui, mais le feu arrive sur vous. L’argent n’embellit pas la vie. Et la ville de Chicago, qui a tant perdu par la faute de l’incendie, a retrouvé une apparence encore plus magnifique. C’est exactement comme la guerre et sa désolation sur laquelle sera bâtie une culture encore plus grandiose.

 

            Maintenant, si vous comprenez l’Esprit de miséricorde que le Seigneur vous envoie, vous comprendrez Son enseignement.

 

Sofia, 17 septembre 1916

 

_________________________

[1] Nastradin Hodja – personnage turc satirique du folklore bulgare

[2] Nous sommes pendant la guerre de 1914-1918

[3] Petar – prénom bulgare courant, équivalent de Pierre

 

Traduit par Bojidar Borissov

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